Crédit d'impôt rénovation énergétique : jugé "inadapté" par l'UFC-Que Choisir

    Publié le 5 novembre 2015 par Carine Lauga
    Rénovation argent
    Rénovation argent © Montage MAP
    Une enquête de l'UFC-Que Choisir vient égratigner la pertinence des aides gouvernementales en matière de rénovation énergétique. "Inefficaces", "complexes", "inadaptés"... les qualificatifs sont rudes pour démontrer qu'entre la théorie et la pratique, le chemin est encore long. Réactions.
    Vingt-trois millions de logements mériteraient d'être rénovés énergétiquement. Un potentiel conséquent mais qui ne serait pas à la hauteur du dispositif du crédit d'impôt dédié, estime une étude de l'UFC-Que Choisir. L'association de consommateurs épingle en effet le CITE, autrefois appelé CIDD, qu'elle juge "inefficace" et "dispendieux". Lors d'une présentation à la presse, le président de l'UFC a même pointé du doigt un "mécanisme pourri et un "système complexe et inadapté".

    Des dépenses en rénovation qui ne diminuent pas...

    Selon l'étude, le crédit d'impôt a davantage coûté qu'il n'a servi au portefeuille des ménages. Mis en place depuis 2005, sous le nom de Crédit d'impôt développement durable, il aurait coûté à la collectivité "pas moins de 15.6 Md€". D'un autre côté, les dépenses réelles des ménages en travaux de rénovation énergétique seraient restées stables depuis 2009, autour de 12 Md€ par an (hors crédit d'impôt), précise l'UFC-Que Choisir. De plus, indique l'étude, "la baisse du crédit d'impôt observée entre 2008 et 2013 (-1.97 Md€) n'a fait reculer le marché total de la rénovation que de 2.31 Md€ : les chiffres montrent donc que le crédit d'impôt n'a pas d'effet d'entraînement, puisque les aides accordées ne sont pas à l'origine de dépenses supplémentaires des ménages destinées à la rénovation".
    Un constat pour le moins embarrassant pour les initiateurs de la mesure, mais aussi pour les entreprises de rénovation. Car, en plus de viser le gouvernement, l'UFC-Que Choisir dénonce une corrélation entre le montant des aides versées et la hausse des prix pratiquée par les professionnels. L'association en veut pour preuve l'augmentation importante des litiges rapportés par ses adhérents...
    Dans un communiqué, la FFB déplore que "UFC-Que Choisir fait surtout un amalgame entre des dispositifs très divers et ignore les améliorations très sensibles apportées ces dernières années, avec la mise en place de la mention RGE et de l'éco-conditionnalité".
    Interrogé par nos confrères de Batiactu, le président de la Capeb, dit s'interroger sur de telles accusations, données sans référence aucune. "Si les artisans faisaient du profit sur le dos du crédit d'impôt, ça se saurait !", nous confie-t-il. Son argument est que si le consommateur ne dépense pas, et donc que les dépenses de travaux de rénovation ne décollent pas, c'est tout simplement qu'en cette longue période de crise, tout est fait a minima. "La confiance n'est toujours pas là, ce qui empêche l'activité de redémarrer", ajoute Patrick Liébus. Et d'asséner : "Il ne faut surtout pas affaiblir le dispositif, qui vient d'être pérennisé. Au contraire, il faut lui permettre de faire redécoller l'activité de la rénovation, qui est la seule aujourd'hui qui tire son épingle du jeu. En attendant le retour de la confiance et d'un contexte plus favorable, il faut continuer de militer pour une mesure lisible et simplifiée", et attendre...

    Une aide mal fléchée dès l'origine ?

    Mais surtout, l'UFC remet en cause "l'absence de corrélation entre les aides versées et la performance énergétique réelle" puisque l'aide est sur l'équipement et non sur la performance obtenue. Un effet pervers qui fait que les Français ont davantage changé leurs fenêtres (41% des travaux) alors qu'elles ne représentent que 10% des déperditions d'énergie, et n'ont entrepris des travaux d'isolation que dans 10% des cas, un poste qui provoque jusqu'à 75% des pertes d'énergie, constate l'UFC. Pire, poursuit l'association, il existe un "effet plancher" qui inciterait les consommateurs à ne se contenter que des produits tout justes éligibles au crédit d'impôt. Et le président de la Capeb de justifier : "Les équipements sont choisis pour atteindre la performance énergétique ! L'artisan fait des préconisations, mais c'est le client qui décide au final".
    C'est pourquoi l'UFC en appelle aujourd'hui aux parlementaires, en plein examen du Budget 2016, pour faire deux propositions : instaurer un crédit d'impôt progressif (en taux et en niveau), basé sur la performance thermique atteinte après travaux et non plus sur les équipements installés ; créer une complémentarité entre l'éco-prêt et le CITE pour que les deux dispositifs puissent se cumuler au profit du consommateur, et là encore en fonction de la performance atteinte. Cela pourrait permettre, a indiqué l'UFC, de créer près de 10.000 postes d'experts chargés de certifier les travaux réalisés. "On donne d'un côté pour reprendre de l'autre ! Ce serait en outre ingérable", s'emporte Patrick Liébus. De son côté, la FFB ne comprend pas non plus, "l'expérience récente de la mise en place calamiteuse du diagnostic de performance énergétique ne milite cependant pas en ce sens".
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