Et si l'homme investissait l'espace et les océans ?

    Publié le 28 février 2017
    L'histoire des civilisations est liée au littoral, à la mer, et depuis peu à l'espace. Au début du 21e siècle, la planète connaît des bouleversements environnementaux et démographiques, obligeant les architectes et ingénieurs à repenser l'habitat. La Fondation Rougerie a distingué douze projets novateurs, prenant en compte les enjeux du développement durable et d'avenir de l'humanité.
    Créé en 2011, le Concours international d'architecture de la Fondation Rougerie est aujourd'hui un rendez-vous incontournable pour les ingénieurs visionnaires et designers d'avenir. Il distribue des prix pour encourager l'imagination à créer le monde de demain.
    Pour cette édition 2016, plus de 600 dossiers ont été reçus, provenant d'une centaine de nations différentes, avec une moyenne d'âge des participants de seulement 25 ans. Le jury a sélectionné les plus pertinents répondant aux thématiques imposées (architecture pour la mer, pour l'adaptation à la montée des océans ou pour l'espace) et adoptant des approches novatrices, tout en ne négligeant pas l'aspect graphique et architectural. Parmi les 33 dossiers retenus en phase finale (10 pour chaque catégorie sauf pour l'architecture de l'Espace, où 13 ont été sélectionnés), douze ont reçu une distinction : Lauréat (10.000 €), Mention spéciale, Coup de cœur et Encouragement.
    Découvrez ces projets avant-gardistes en images dans les pages suivantes.
    Et si l'homme investissait l'espace et les océans ?

    "Prix Innovation & Architecture pour la Mer" : Lauréat

    Reef of Silence
    Reef of Silence © Fondation Rougerie
    "The Reef of Silence", Yunil Nam (Corée du Sud)
    Inspiré par "Vingt mille lieues sous les mers", le projet "The Reef of Silence" imagine un lieu funéraire et des cultures de coraux insérées dans une structure sous-marine. Il mène en parallèle une étude sur les questionnements culturels et environnementaux qui se posent dans l'océan Indien, et notamment de l'impact des rituels hindous, menés dans le Gange, fleuve sacré qui l'alimente. Le gouvernement indien mène des recherches de formes alternatives d'enterrement et d'incinération afin de créer des liens entre sépulture et écologie marine, par le biais de culture de corail, espèce en déclin. Des procédés futuristes tels la lyophilisation ou la liquéfaction, transformant le corps humain en nutriments sous forme de poudre ou de liquide (sic). La structure sous-marine proposée, sous le nom de "vautour tectonique", se recouvrira au fil du temps et deviendra un récif rétablissant la vie marine. La croûte s'épaissira et cachera progressivement l'installation funéraire qui se transformera en récif corallien artificiel dans la baie du Bengale.
    "Prix Innovation & Architecture pour la Mer" : Lauréat

    Mention spéciale - Et si l'homme investissait l'espace et les océans ?

    Anticipatory Archipelagos
    Anticipatory Archipelagos © Fondation Rougerie
    "Anticipatory Archipelagos, the restorative land", Shaunice Ten (Singapour)
    Les littoraux habitables s'étendent toujours. Le projet récompensé par cette mention spéciale conteste la valeur attribuée aux relations entre la terre et la mer par les pratiques. Il propose une alternative courante sans compromis sur l'équilibre entre les deux milieux, avec un archipel restauré où les terres et la mer sont propres et dotées d'une valeur ré-adaptatrice et réparatrice. Le système intègre les préoccupations environnementales et fonctionne comme un antidote pour les eaux en péril. Il repose sur un cadre temporel, utilise la terre de façon à gommer les limites de l'architecture et de la géographie. Les îles se mueront ainsi pour être semi-naturelles, leur structure organique passant de plateformes mouvantes à des espaces rocheux qui sécuriseront les terres de façon permanente. L'utilisation est basée sur la densité des bio-roches et le recours à des procédés de phyto-remédiation, de production en circuit fermé.
    Mention spéciale - Et si l'homme investissait l'espace et les océans ?

    Coup de cœur

    Water Pavilion
    Water Pavilion © Fondation Rougerie
    "Water pavilion walk towards the ocean", Daniel Valle Almagro (Espagne)
    Le projet explore divers principes liés au monde aquatique : fluidité, flottabilité, changement constant. Le pavillon se situe entre niveau submergé et émergé, définissant un état d'équilibre entre sec et humide. Il invite tous les visiteurs à marcher vers l'océan. L'effet visuel créé semble donner la possibilité de marcher sur lui et vise à représenter le risque réel de submersion des zones côtières. Une sculpture d'eau marque l'extrémité de la plateforme : il s'agit d'un gouffre où l'eau chute en permanence et créé un nuage de brouillard en suspension. Le pavillon se passe de fondations et se comporte comme un bateau amarré qu'il est possible de déplacer. Il constitue aussi une machine hydraulique offrant diverses configurations en relation avec l'eau : en remplissant ses réservoirs répartis le long de sa structure, il peut gagner ou perdre en flottabilité et ajuster son tirant d'eau. Le projet intègre un système désalinisateur, tandis que la consommation d'énergie est réduite grâce à diverses solutions (panneaux solaires, micro-turbines sur la cascade...).
    Coup de cœur

    Encouragements - Et si l'homme investissait l'espace et les océans ?

    Civilization 0.000
    Civilization 0.000 © Fondation Rougerie
    "Civilization 0.000", Dimo Ivanov (Bulgarie)
    Le projet futuriste envisage un monde sans frontières artificielles, sans pays ni gouvernements. Les ressources y seraient mesurées et distribuées en fonction des besoins réels, sans gaspillage. L'imaginatif Dimo Ivanov propose une série de six gratte-ciels connectés appelés "Unités 0.000" qui les réguleraient. Chaque entité assurerait une fonction clé : habitat, éducation, gestion des ressources, production, stockage d'énergie ou production d'électricité. Des fonctions qui seraient déterminées par l'environnement dans lequel les constructions seraient implantées. Une serait, par exemple, installée au Cap Horn (Chili) et servirait à la production d'énergie électrique en faisant usage du vent et des puissantes vagues de cette région du monde. Une combinaison de 19 éoliennes, quatre hydroliennes et six turbines marémotrice serait ainsi mobilisée. L'énergie cinétique pourrait également être convertie à hauteur de 40 %. Le tout fournirait, selon les calculs de l'architecte, 100 millions de kWh de courant par an. L'unité du Cap Horn disposerait également d'un centre de recherche, d'un héliport et d'espaces de vie. Les niveaux supérieurs pourraient abriter 500 personnes, soit 400 scientifiques et 100 étudiants.
    Encouragements - Et si l'homme investissait l'espace et les océans ?

    "Prix Architecture & problématique de la montée du niveau des Océans" : Lauréat

    New Edge
    New Edge © Fondation Rougerie
    "New Edge - Extending shore boundaries", Prethvi Raj & Prasanth Jayaprakash (Inde)
    Quelques centimètres d'eau en plus peuvent faire disparaître des kilomètres de côtes. L'approche New Edge ne recherche pas de solution unique globale mais se concentre sur les potentiels invisibles de chaque contexte pour construire un réseau efficace et adaptatif. Les îles du Pacifique sud ont été identifiées comme les plus vulnérables. Le rapport entre terre, ressource de base, et eau douce, carburant de survie, est le point crucial. La stratégie de conception s'étend donc sur trois niveaux : le terrain doit être renforcé, la menace de l'eau doit être transformée en opportunité nouvelle pour la culture de corail et l'entre-deux doit être affiné avec l'installation de structures hydrauliques afin d'irriguer les terres.
    "Prix Architecture & problématique de la montée du niveau des Océans" : Lauréat

    Mention spéciale - Et si l'homme investissait l'espace et les océans ?

    H2O ferme flottante
    H2O ferme flottante © Fondation Rougerie
    "H2O ferme flottante humanitaire", Léo Bentegeat, Zhicheng Weng & Zicheng Cui (France-Chine)
    H2O signifie ici "Humanitarian Harbour of the Ocean", il s'agit donc d'une ferme flottante répondant à l'urgence. Une véritable cité lacustre capable d'accueillir 500 réfugiés dans 250 logements, soit l'équivalent d'un village ou d'un petit quartier. La plateforme sert avant tout de ferme intensive, visant à l'autonomie alimentaire et énergétique. Elle utilise donc un ensemble de solutions innovantes d'aquaponie (culture agricole en symbiose avec l'élevage des poissons), aéroponie (culture hors sol) ou entomoculture (élevage d'insectes) pour constituer un écosystème autosuffisant. La structure modulaire s'adaptera aux stades d'avancement de la montée des eaux. Dans l'immédiat, le module H2O a pour vocation d'être déployé près d'une ville menacée directement par une catastrophe, mais il pourrait être utilisé comme ferme urbaine proposant une offre agricole de proximité pour les villes en manque de terres arables. A l'horizon de la fin du siècle, l'association de plusieurs modules représenterait une extension urbaine flottante, reliant et protégeant les villes menacées par l'érosion. A plus long terme encore (vers l'an 2500), une plus vaste combinaison circulaire de modules constituerait une véritable ville flottante, indépendante du continent et permettrait ainsi d'habiter la mer, comme un archipel.
    Mention spéciale - Et si l'homme investissait l'espace et les océans ?

    Coup de cœur

    Buoyant light
    Buoyant light © Fondation Rougerie
    "Buoyant light", Claire Lubell & Virginia Fernandez Ricon (Canada)
    Le projet Buoyant Light s'adresse à la communauté Inuit d'Igloolik, située dans l'arctique canadien. Cette dernière est particulièrement vulnérable aux changements de concentration de glace de mer, conséquence de l'augmentation des températures mondiales et de la montée du niveau de la mer qui affecte la sécurité de la chasse et la mobilité des habitants. La solution proposée combine un ballon et une bouée pour recueillir des données environnementales, tout en absorbant l'énergie solaire pour fournir de la lumière pendant le long hiver. Les plus grands ballons sont les plus proches du rivage et donnent à la communauté un accès visuel à l'information. Abaissés en hiver, ils délimitent des espaces pour des réunions ou des spectacles. Les plus éloignés se situeront dans les eaux libres et agiront comme des balises le long d'itinéraires de voyage ou de chasse.
    Coup de cœur

    Encouragements - Et si l'homme investissait l'espace et les océans ?

    Land-Water Co-Habitation
    Land-Water Co-Habitation © Fondation Rougerie
    "Land-Water co-habitation", Tang Jeliang (Hong Kong)
    La ville de Hong Kong est menacée par le changement climatique, en liaison avec les phénomènes météorologiques violents : pluies torrentielles, typhons, tsunamis. Des événements qui affectent le fonctionnement du système de transport et la mobilité des personnes. Le projet propose une adaptation aux forces de ce changement avec des plateformes d'habitation "nearshore" qui coexisteraient avec le front de mer naturel. Tolo Harbour a été choisie comme site de test en raison de sa forme d'alcôve et des massifs environnants qui causent l'une des variations de marée les plus importantes de la ville.
    Encouragements - Et si l'homme investissait l'espace et les océans ?

    "Prix Innovation & Architecture pour l'Espace" : Lauréat

    The Terra Chronicles
    The Terra Chronicles © Fondation Rougerie
    "The Terra Chronicles", Ruoning Deng, Shixiang Zheng, Yuteng Lin (Chine-Canada)
    Les "Terra Chronicles" proposent un réseau de monuments verticaux pour abriter la vie. Ils conserveront des échantillons d'ADN de toutes les espèces existantes dans une fibre qui reflètera les interactions et les crises affrontées par chacune d'entre elles à travers le temps. La distance physique entre chaque fibre représentera la relation actuelle entre les deux espèces. Les nœuds qui se trouveront entre plusieurs fibres seront les écosystèmes dans lesquels vivent les espèces. Les échantillons de biomes auront le potentiel d'être restaurés ou multipliés, afin que la Terre ou d'autres planètes habitables puissent accueillir à nouveau la vie. Trois systèmes structurels distincts créeront de façon cohérente la forme et la fonction. La structure primaire, de branches épaisses, ressemblera à des os. Elle soutiendra la structure secondaire, semblable à des cheveux contenant chaque espèce vivante. La structure tertiaire enfin, sera composée de capsules à membrane souple, extrudée des intersections et nœuds des deux autres systèmes. De loin, chaque tour sera perçue comme une frise chronologique se prolongeant vers l'espace, incorporant vie et mort des organismes sur Terre. Il s'agit donc d'un hommage mais également d'une semence potentielle attendant d'être envoyée dans le firmament.
    "Prix Innovation & Architecture pour l'Espace" : Lauréat

    Mention spéciale - Et si l'homme investissait l'espace et les océans ?

    Green Solar Airship
    Green Solar Airship © Fondation Rougerie
    "Green Solar Airship", Jean-Marc Schivo, Lucilla Revelli & Gérard Feldzer (Italie-France)
    Le Green Solar Airship volera en silence, sans émission de gaz à effet de serre, sur de grandes distances. Trois applications différentes sont envisagées : tourisme pour 45 à 120 passagers, transport régional de fret (jusqu'à 37 tonnes) et recherche scientifique, mission de surveillance ou de secours. Sa forme aérodynamique est inspirée de la raie Manta ce qui lui permet de battre des records de vitesse pour un dirigeable (avec une allure de croisière de 80 km/h et des pointes possibles à 210 km/h) et de bénéficier d'une portance supplémentaire (afin de soulever 1,5 fois sa masse). Ses dimensions sont respectables : 165 mètres de long, 45 mètres de large et 75.000 m3 d'hélium (soit beaucoup plus que l'Airlander). L'énergie proviendra de 7.000 m² de panneaux photovoltaïques d'une puissance de 1.400 kWc, mais également d'une pile à combustible hydrogène de 1.000 kW, qui alimenteront les huit moteurs orientables. La structure rigide sera réalisée en matériaux composites et comprendra quatre niveaux, avec huit réservoirs d'hélium et des ballonnets d'air pour compenser les différences de température, une zone technique comprenant les accumulateurs, un espace vie de 1.000 m² pour les passagers et un espace pour l'équipage de 400 m² supplémentaires, incorporant le poste de pilotage et les équipements électroniques. L'altitude de croisière sera comprise entre 500 et 2.500 mètres, puisque l'aéronef n'est pas pressurisé. Quant à l'autonomie, elle est évaluée à 100 heures, grâce à des batteries Li-ion.
    Mention spéciale - Et si l'homme investissait l'espace et les océans ?

    Coup de cœur

    Noah's Ark
    Noah's Ark © Fondation Rougerie
    "Projet Noah's Ark", Samer el Sayary (Egypte)
    La légende de l'Arche de Noé est commune aux trois religions du Livre. Le navire spatial imaginé s'approche des modèles passifs : il est autosuffisant et accueille de nombreuses créatures. L'arche est conçue pour rester dans l'espace profond mais elle peut atterrir sur le sol de Mars. Elle utilise des voiles solaires qui exploitent la poussée des photons de la lumière solaire sur de grandes surfaces réfléchissantes. La nef est également équipée d'un réacteur nucléaire en poupe, pour alimenter les systèmes. Une fois sur la surface d'une planète, un robot de forage laser guidé créera des colonies souterraines biomimétiques, inspirées des fourmilières, qui abriteront des espaces résidentiels, structurés sur différents niveaux.
    Coup de cœur

    Encouragements - Et si l'homme investissait l'espace et les océans ?

    Architecture on the Moon
    Architecture on the Moon © Fondation Rougerie
    "Architecture on the moon", Victor del Carpio Torres (Pérou)
    L'exploration spatiale entrerait-elle dans un nouvel âge d'or ? Les progrès technologiques ouvrent de nouvelles possibilités, l'occasion de concevoir l'architecture pour d'autres mondes, qui répondrait à leur nature et leur signification. L'habitat lunaire ici dévoilé permettra d'étudier la surface et les différents aspects de la vie en microgravité. Un lieu d'accueil dédié au tourisme spatial est présent, permettant de financer les recherches. L'architecture étant définie par le contexte et le paysage, le bâtiment proposé ici donne un cadre à la Terre : il cherche à se connecter à des corps célestes et à des événements astronomiques comme des éclipses.
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