Plan de relance du logement : tout pour relancer l'offre

    Publié le 1 septembre 2014
    Manuel Valls a détaillé vendredi 29 août une série de mesures pour relancer le secteur du logement axée notamment sur l'offre de logements neufs. Il a également annoncé une modification profonde de la loi Alur, en supprimant en premier lieu la substance de l'une de ses mesures-phares, l'encadrement des loyers, et en restreignant finalement la garantie des loyers. Détails et réactions.
    "Simplifier, assouplir, encourager", voici les mots de Manuel Valls présentant son plan de relance de la construction.

    Détricotage de la loi Alur

    Tout d'abord la loi Alur sera assouplie. L'encadrement des loyers ne sera appliqué qu'à Paris et à titre expérimental. "Nous avons assez de recul pour juger des difficultés de sa mise en œuvre", a-t-il justifié. Il prévoit aussi de simplifier certaines dispositions comme les formalités en cas d'acquisition d'un bien. D'autre part, la Garantie universelle les loyers (GUL) sera recentrée sur les jeunes salariés et les personnes en situation précaire.

    Le Duflot est mort, vive le Pinel !

    Le premier ministre a également annoncé la création d'un nouveau dispositif pour favoriser l'investissement locatif. Il portera le nom de l'actuelle ministre du Logement, Sylvia Pinel. Celui-ci repose sur une réduction sur l'achat d'un bien loué pendant 6, 9 ou 12 ans. Comme prévu, Manuel Valls a annoncé qu'il sera possible de louer, sous certaines conditions, à ses ascendants ou descendants. Enfin, les conditions d'accès au dispositif des sociétés civiles de placement immobilier seront alignées sur celles des particuliers. "Les SCPI contribuent en effet de manière importante à la production de logements locatifs intermédiaires", a-t-il précisé.

    Soutien des ménages primo-accédants

    Tandis que les primo-accédants peinent à acquérir un bien immobilier, le Gouvernement a décidé de les aider par le biais de trois leviers : allonger la période pendant laquelle le remboursement du prêt à taux zéro (PTZ) est différé ; appliquer le taux de TVA à 5,5 % pour l'accession à la propriété d'un logement neuf pour les ménages modestes dans les nouveaux quartiers prioritaires ; et créer un abattement exceptionnel de 100 000 euros pour les donations aux enfants et petits-enfants réalisées jusqu'à fin 2016 de nouveaux logements neufs.

    Mobilisation du foncier

    "Il faut libérer des terrains, beaucoup plus de terrains !", a déclaré Manuel Valls. Ainsi, des modifications sur les plus-values sur les terrains à bâtir sont à mentionner, soit un abattement exceptionnel de 30% de l'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux sur les plus-values réalisées en cas de cession de terrains à bâtir pour toute promesse de vente conclue avant le 31 décembre 2015. Au programme également : la création d'un abattement exceptionnel de 100.000 euros pour les donations de terrains réalisées jusqu'à fin 2015, à la condition qu'ils soient ultérieurement construits.

    Relancer de la construction de logements

    A travers une intervention exceptionnelle de l'Etat et du groupe Caisse des dépôts, Manuel Valls a réitéré son soutien aux logements intermédiaires, en annonçant la construction de 30.000 en zones tendues dans les cinq prochaines années. Au 1er janvier 2015, les préfets auront la possibilité de délivrer des permis de construire dans les communes ne remplissant pas leurs obligations de construction de logements sociaux.
    Travaux de rénovation énergétique des logements
    Afin de soutenir l'activité des artisans et améliorer l'habitat, le plan mise sur la simplification et augmentation du crédit d'impôt développement durable : son taux sera porté à 30 % pour les travaux de rénovation énergétique engagés à partir du 1er septembre 2014. L'Anah soutiendra également le financement de 50 000 projets de travaux de rénovation énergétique de propriétaires modestes en 2014.

    Simplification des normes

    Réclamé à plusieurs reprises par les professionnels de la constitution, il semble qu'ils aient été entendus. Si le 25 juin dernier, 50 mesures de simplification vont être appliquées d'ici au 31 décembre 2014, le premier ministre a indiqué qu'il fallait "aller plus loin !" Il a expliqué : "Je pense, par exemple, aux normes obligeant à construire des parkings ; elles sont excessives dans les zones desservies en transport en commun. Je pense également aux normes sismiques, qui seront allégées pour les éléments non structuraux". Une nouvelle série de mesures devrait voir jour inspirées des propositions faites par les professionnels du secteur sur le site internet ouvert par la ministre du Logement en juillet dernier. Autre mesure : le raccourcissement des délais d'obtention des permis de construire. A ce propos, une mission est confiée au Préfet Jean-Pierre Duport qui rendra ses premières conclusions d'ici à trois mois. Enfin, la durée de validité des permis de construire en cours est portée de 2 à 3 ans.

    Découvrez les réactions à ces annonces en pages suivantes.

    Dernière minute : L'encadrement des loyers également expérimenté à Lille et Grenoble ?
    Le dispositif d'encadrement des loyers, désormais limité à une expérimentation parisienne, pourrait cependant être étendu à d'autres municipalités. Ce week-end, Martine Aubry, maire de Lille, et Christophe Ferrari, président de l'agglomération grenobloise, ont manifesté leur volonté d'adopter malgré tout ce mécanisme. Le Premier ministre a déclaré ne pas y être opposé. Il a ainsi déclaré à nos confrères du JDD : "Si en plus de Paris, d'autres villes comme Lille sont volontaires pour expérimenter l'encadrement des loyers, qu'elles le fassent". Une mesure qui peut relever des conseils municipaux sans avoir à en référer au gouvernement.
    Plan de relance du logement : tout pour relancer l'offre

    Cécile Duflot et les associations en colère

    Les professionnels de la construction se sont montrés dans l'ensemble très satisfaits des mesures annoncées qui devraient permettre une relance de l'activité de la construction. Les professionnels de l'immobilier ne sont pas en reste, contents de voir la loi Alur modifiée dans le sens voulu.
    L'ancienne ministre Cécile Duflot, dont Alur, la loi-phare a été détricotée et celle qui porte son patronyme, changée et débaptisée, a rapidement fait éclater sa colère. Jugeant "inouï", l'abandon de l'encadrement des loyers - mesure pourtant promise pas le candidat Hollande - elle dénonce un "recul" qui n'est qu'un "cadeau pour les lobbies des professionnels de l'immobilier".
    Et du côté des associations, propriétaires, locataires et mal-logés, des mécontentements se sont faits également entendre.
    Denys Brunel président de la Chambre Nationale des Propriétaires déclare dans un communiqué : "Trop peu, trop lent ! La Chambre Nationale des propriétaires juge les mesures du plan de relance du logement, annoncées par Manuel Valls, insuffisantes en ce qui concerne le rétropédalage de la loi Alur et les mesures fiscales."
    La Confédération Nationale du Logement (CNL) salue dans un communiqué "la volonté de fermeté du Gouvernement dans l'application de la loi SRU renforcée par la loi Duflot et dans la pénalisation des communes qui ne l'appliquent pas dès le 1er janvier 2015."
    Elle juge également "raisonnable l'aménagement du dispositif d'encadrement des loyers".
    En revanche, la CNL critique ouvertement certaines mesures :
    "Modification du dispositif Duflot pour plus de souplesse, choc de simplification, prêts à taux zéro plus accessibles... oui MAIS ! Les propositions annoncées par le gouvernement ne sont pas à la hauteur des attentes : les citoyens crient baisse des charges et des loyers, 'logement abordable et de qualité', le gouvernement répond par un cadeau fiscal aux ménages les plus aisés !" /i>
    Pour la CNL, les politiques de défiscalisation sont une erreur : "Elles coûtent 4 fois plus cher aux contribuables que la construction de logements sociaux. Deux millions de citoyens sont en attente d'un logement social : il est urgent d'abandonner la logique du 'tous propriétaires pour une France des habitants." Et d'ajouter par la voix de son président à l'AFP : "(...)les lobbies de l'immobilier ont une nouvelle fois obtenu satisfaction sur la loi Alur."
    Pour la CLCV, c'est une "reculade". David Rodrigues, juriste à l'association de consommateurs a déclaré à l'AFP : "Les mesures concernant l'encadrement des loyers ne sont pas admissibles et constituent une reculade malheureuse de la politique du logement. A aucun moment un lien de causalité n'a pu être démontré entre la loi Alur et les chiffres de la construction. Pire, les annonces faites ne concernent que peu le foncier."
    La fondation Abbé Pierre a communiqué quant à elle que : "Soutenir l'offre est indispensable, mais ne peut se faire sans contreparties sociales et sans régulation des marchés. La menace qui pèse sur l'encadrement des loyers (...) est profondément inquiétante et pourrait préfigurer un abandon du dispositif, ce que la Fondation Abbé Pierre ne peut accepter. Le logement est trop cher, et pas seulement à Paris mais aussi dans de nombreuses agglomérations."
    Jean-Marc Eyraud, porte-parole de Droit au Logement (DAL) a de son côté déclaré :
    "Ces mesures sont choquantes et profondément injustes. Elles consistent à aider les riches et les bailleurs privés à affronter la crise immobilière, plutôt que de secourir les victimes de la spéculation et du logement cher."

    La Fnaim veut un plan qui va plus loin

    La Fédération nationale de l'immobilier (Fnaim) considère qu'une action ciblée sur le parc ancien privé est également indispensable. Et de préciser dans un communiqué : "Avec un taux de vacance moyen estimé à 7,2 %, mais avec des territoires où ce taux atteint les 25 %, le parc ancien privé doit être considéré comme un gisement de logements à mobiliser pour répondre à une priorité sociale pour les familles et les jeunes".
    Vers un statut fiscal du bailleur privé
    Elle propose donc le lancement d'un deuxième volet de mesures qui viendrait compléter celles de relance de la construction et compenser le manque de logements en élargissant "l'offre locative ou d'achat pour les primo-accédants". Les agents immobiliers proposent notamment la création d'un statut fiscal du bailleur privé acceptant de mettre à disposition des logements existants à des loyers inférieurs au prix du marché. Leur fédération devrait émettre, dans les prochaines semaines, une série d'autres propositions concrètes qui seront présentées au Premier ministre et à la ministre du Logement. "L'opportunité de lancer une réflexion globale, avec tous les acteurs concernés, sur la fiscalité immobilière des particuliers, afin de la rendre plus simple, plus lisible et plus encourageante", conclut le communiqué.
    Cécile Duflot et les associations en colère
    Articles qui devraient vous intéresser
     
    Recevez gratuitement
    La newsletter Maison à Part
    L'e-magazine de l'habitat sous tous les angles
    Vous pouvez vous désabonner en un clic