Le design au coeur de l'ADN de Citroën

Dans l'automobile, "toutes les facettes du design sont représentées" nous explique Thierry Métroz. Le designer travaillera tant l'optimisation de la fonctionnalité et la sublimation de la technologie, que son geste artistique. Il est "au carrefour des métiers de l'ingénierie et du commerce, de la publicité, de la communication et du marketing produit", et assume ainsi pleinement son rôle de "lien", voire de "liant". A cela s'ajoute aujourd'hui la nécessité d'élaborer un "design narratif", ajoute le directeur de style : "Il n'existe plus de 'mauvaises' voitures, en termes de style, le produit ne se suffit plus : ce qui séduira le client, c'est le sens donné au produit et à la marque." Voire le sens que ce dernier entendra donner à sa future voiture grâce à la personnalisation, un élément intégré par exemple pour la DS3, dont le toit peut être choisi. Suite de l'article en pages suivantes.

Sous la houlette de Jean-Pierre Ploué, directeur de style du groupe PSA et de Thierry Métroz, pour Citroën, du croquis d'origine au prototype puis au produit final - un processus qui peut prendre plusieurs années - des dizaines de personnes s'affairent à la création : trente designers, tous métiers confondus, "une équipe compacte et réactive", dans laquelle pas moins de 18 nationalités sont représentées, un gage de diversité ; trente personnes également pour le modelage CAO ; quatre pour l'imagerie virtuelle ; dix autres dans l'équipe de style sur volume, qui façonne à l'aide de polystyrène des prototypes permettant d'appréhender l'aspect final ; et enfin, l'équipe "Couleurs et Matières" qui "décorera" la voiture. Derrière l'une des portes qui jalonnent les longs couloirs blancs immaculés de l'ADN - assez larges pour faire passer des véhicules souvent, là encore, "bâchés" pour garder tous les secrets - Olivier Daillance, nous accueille dans ses bureaux... Suite de l'article en pages suivantes.

Ancien de chez Vuitton et désormais responsable de l'atelier Couleurs et Matières chez Citroën, Olivier Daillance dirige une équipe de douze personnes - quasiment toutes diplômées de grandes écoles de design et au profil artistique affirmé. Parmi leurs dernières réalisations marquantes, la DS5 ou encore, le concept car Tubik, qui s'interroge sur les nouveaux modes de vie en déplacement. Pour ces derniers modèles, leur rôle - comme toujours - a été essentiel. "Nous sommes décorateurs de voitures, nous explique Olivier Daillance, nous nous occupons ainsi de tout ce qui se voit, l'intérieur, du sol au plafond, et de ce qu'il y a autour... jusqu'aux jantes chromées !" Pour la DS5, il fallait parachever le virage de style haut de gamme pour Citroën, tandis que pour le concept car Tubik, c'est un intérieur complet, tel un salon-chambre roulant, qu'il a fallu concrétiser.

"On travaille sur quatre des cinq sens : le visuel, le toucher, l'olfactif - on fait attention par exemple à l'odeur du cuir - et l'ouïe, en essayant d'accompagner l'harmonie intérieur avec les sons du klaxon, de la ceinture, etc." Et pour se différencier, leurs recherches vont tous azimuts : ils n'hésiteront ainsi pas à prendre attache avec un fabricant de timbres poste ou un autre de filtres industriels, quand une idée les tient. Leurs sources d'inspiration ? "Nous nous intéressons à tout, sauf à la voiture", précise Olivier Daillance. Mode, architecture, design, domotique, mobilier... Et pour satisfaire leurs exigences, ils font appel "aux meilleurs artisans du monde entier", en termes de cuir, de peinture, de métal, etc. Car deux mots clés sous-tendent tout leur travail : l'artisanat - la tradition du savoir-faire - et l'innovation. Suite de l'article en pages suivantes.

Ainsi, en couture du cuir, le "point perle" que l'on trouve dans la DS s'inspire de celui trouvé sur des costumes d'homme. Mais pour l'industrialiser et le faire durer, il a fallu inventer ! On peut citer aussi la conception dite "bracelet montre" des sièges en cuir, ou encore un dégradé de couleur inspiré par la vision d'une chaussure Prada... Ce souci du détail et de la qualité prend du temps, voire plusieurs années... et s'achève au dernier moment : "chaque mm2 de la voiture est ausculté", examiné à la loupe. Le grand open-space l'atelier Couleurs et Matières se révèle d'ailleurs caverne d'Ali-Baba où, entre le bric à brac design rapporté de "shoppings tendance" (chaussures, vases, bibelots, etc.), les échantillons couleurs, de tissus, de cuir côtoient d'autres de portes, de poignées, de volants... Le tout dans une ambiance comparable à celle que l'on pourrait trouver dans un cabinet d'architectes et de designers, sur fond de musique rock ! Suite de l'article en pages suivantes.

Un petit tour par l'atelier sellerie de Jean-Philippe Vanhulle achève de nous convaincre sur le travail d'orfèvre qui s'opère entre ces murs : c'est grâce à son atelier, par exemple, que l'on peut admirer le fameux "bracelet montre" sur l'ensemble de la gamme DS. "Nous sommes très fiers d'avoir réussi son industrialisation". Le "monsieur cuir" de chez Citroën affiche 24 ans de sellerie automobile et a travaillé, outre les voitures, sur pas moins de 40 à 50 concepts cars. Réinventer les plissés, rechercher les meilleurs points... Sûr, il y a de quoi être fier ! Parmi les derniers, le concept DS "White Pearl", bijou de raffinement, a demandé 1.000 heures de travail à six selliers à plein temps.

La fierté, c'est d'ailleurs le sentiment général de toutes les équipes rencontrées, passionnées par ce qu'elles font. L'on parle le plus souvent de l'automobile en ce qu'elle contient "sous le capot", mais lorsque ces dernières nous emmènent pour achever la visite, dans le Dôme, immense espace au sommet du bâtiment, pour admirer leurs trois dernières perles - la White pearl, la DS5 et le Tubik - l'on voit bien que l'ADN de l'automobile, sans conteste, est aussi à découvrir avec elles. Découvrez en images, leur travail sur la DS et le Tubik en pages suivantes.

Sabine Pannetrat de l'atelier Couleurs et matières nous parle de la DS. Une voiture mythique qui trouve aujourd'hui une nouvelle jeunesse dans la gamme actuelle, dont la ligne directrice est définie par les termes d'"héritage", d'"avant-garde", de "raffinement" et celui d'"hypnotique".

Assurément, le ton est donné pour un haut de gamme séduisant et envoûtant, qui s'affiche sans ciller et sans oublier l'essentiel : la baseline de Citroën, "Creative technology". A l'intérieur, l'on rivalise de raffinement avec notamment son siège "bracelet montre" et ses points "perle", tandis que la trame se devine...

Thomas Leret, chef de projet couleurs et matières pour le concept car Tubik : "Avec les nouvelles motorisations, on réduit les consommations et on regagne en volumes ; avec le Tubik, on a voulu accompagner cette tendance et ainsi montrer que l'on était capabe de faire un véhicule élégant, raffiné, avec des volumes très généreux..."

Elégance et modularité pour ce concept car très inspiré : ses lignes à l'avant semblent un mix entre celui des vieux fourgons Citroën et une fusée spatiale américaine, tandis qu'à l'intérieur, l'on peut profiter de neuf places, un écran plat, un canapé et des fauteuils transformables... et de tissus en soie...

"Notre travail s'apparente à de l'architecture d'intérieure, sauf que nous, nous ne pouvons pas retirer facilement une lampe..." Vincent, de l'atelier Couleurs et Matières, qui peaufine ici un détail sur le concept White Pearl. Entre normes et contraintes, rien est simple ! "Le suivi est très important et cela fait plaisir de voir ensuite un travail bien fait et reconnu."