Compteurs "communicants" : un coût bien plus élevé que prévu

En 2008, ERDF annonçait fièrement "sa révolution", en relevant "le défi de la modernité" notamment grâce au lancement de Linky, compteur électrique nouvelle génération, "communicant", permettant d'optimiser les consommations des usagers ainsi que la transmission directe d'informations - donc une facturation fondée sur des consommations réelles - avec le fournisseur. Mais deux ans plus tard, l'heure est à la polémique. Révélé par le Parisien dans son édition de mardi, le coût de l'installation totale pour les 35 millions de foyers français abonnés avoisinerait, non pas les 4 milliards d'euros prévus à l'origine, mais entre 8 et 9 milliards d'euros d'après la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR), soit 230€ par usager ! Ce coût intègre "la fourniture et la pause des compteurs en eux-mêmes, la fourniture des concentrateurs qui sont chargés de collecter les données de chacun des compteurs pour les réémettre vers le système de gestion et d'exploitation d'ErDF et la création des systèmes informatiques de gestion et d'exploitation des données", a indiqué à l'AFP Jean-Luc Dupont, membre du bureau de la FNCCR. A raison de quelques centimes ajoutés au fur et à mesure jusqu'en 2020 sur la ligne de facturation Turpe (Tarif d'utilisation des réseaux publics d'électricité) pour que l'abonné ne sente pas trop la pilule passée...  Les "ratés" de l'expérimentation Et la grogne monte également du côté des élus des villes-tests, dans lesquelles l'expérimentation a commencé, dans la région de Tours et de Lyon. Selon le Parisien, "dans la région de Tours, sur les 40.000 compteurs de nouvelle génération qui devaient être installés au 31 mai, seuls 19.000 ont été mis en place. Et seuls huit fonctionnent correctement." Les dysfonctionnements sont apparus alors même que la fonction "communicante" n'est pas encore mise en route, ce qui devrait se faire dans un deuxième temps. Les témoins interrogés par le quotidien national, non seulement mettent en cause la manière un peu rustre - "débarquant sans prévenir" - dont s'est passée l'installation, mais parlent surtout de coupures incessantes, avec des "plombs qui sautent en permanence." La faute à une sensibilité plus forte du compteur, n'autorisant "pratiquement aucun dépassement de la puissance préréglée"... ce à quoi ERDF répond que l'usager doit l'augmenter et donc payer plus cher ! Pour le président du Syndicat intercommunal d'énergie d'Indre-et-Loire, comme pour le porte-parole de la Fédération des collectivités locales, interrogés également par le Parisien, il aurait enfin fallu, avant de penser à installer des compteurs intelligents, remettre surtout en état un réseau toujours plus vétuste...  ERDF répond Pour ERDF, il n'y a pas de quoi polémiquer : "300.000 compteurs seront installés d'ici fin 2011, permettant ainsi une information des clients sur leur consommation et des gains substantiels d'économie d'énergie (de l'ordre de 10 à 15 %). Pour une facture moyenne de 400 euros annuelle par foyer, cette économie pourrait atteindre 50 euros par an", précise l'entreprise dans un communiqué. "Selon les estimations de l'ensemble des experts du secteur, le coût de cet équipement pour le client n'excédera pas 1 ou 2 euros par mois sur 10 ans soit un montant très inférieur aux gains générés par les économies d'énergie." Quant au déploiement national du compteur, il n'est pas encore à l'ordre du jour : "Aujourd'hui, la décision de généraliser le déploiement des compteurs communicants et son mode de financement n'est pas prise, elle dépendra, par nature, des enseignements tirés du test en cours." Dite expérimentation qui suit un cours normal : 30.000 compteurs sont ainsi posés, déclare ERDF et 70.000 devraient l'être d'ici juin. Enfin, l'entreprise précise qu'"A travers différents canaux (numéro vert, contacts avec les élus locaux, etc), ERDF est en lien permanent avec ses clients et le restera tout au long de la phase d'expérimentation." A noter que le remplacement des compteurs électriques par ce type de compteurs nouvelle génération répond à une directive européenne de 2006 - d'ici à 2020, 80% des compteurs doivent être "intelligents", permettant aux usagers d'optimiser leurs consommations - qui a donné lieu notamment à la loi sur l'énergie du 7 décembre 2006, avec l'ouverture à la concurrence et la création d'ERDF.