Pourquoi ouvrir une agence d'architecture d'intérieur aujourd'hui ?
Le site Selency, qui aide les particuliers à chiner, existe depuis 11 ans. Au fil des ans, nous avons développé un service pour les professionnels de l'aménagement, adoptant une démarche très opérationnelle : ils nous contactent pour que nous les accompagnions sur la facturation et la livraison de gros volumes. Nous avons ensuite développé une dimension plus créative avec un service de curation à partir d'un cahier des charges.
Aujourd'hui, nous allons encore plus loin avec un studio d'architecture d'intérieur pour l'hôtellerie et la parahôtellerie, proposant un service très complémentaire avec ce que nous faisons déjà. Les acteurs de l'hôtellerie ont besoin de créer des identités fortes et sont prêts à investir dans leur décoration. C'est un vrai terrain d'expression créative.
Je me suis beaucoup engagée, à titre personnel, dans cette évolution. Je pense que je suis une architecte d'intérieur refoulée car c'est un métier qui m'a toujours passionnée. C'est intéressant d'apporter ma casquette très business à ce métier.
Avec une équipe composée de deux architectes d'intérieur, deux décoratrices et une personne en charge de la gestion des achats, nous proposons un accompagnement à la carte. Les différentes étapes proposées vont de la phase de création, de storytelling, à la phase de conception architecturale, jusqu'à la gestion des travaux. Ainsi, nos clients peuvent bénéficier d'un accompagnement de A à Z pour leurs projets. L'objectif est de faire des propositions cohérentes avec nos valeurs, qui favorisent le réemploi, le recyclage et bien sûr la seconde main. Notre offre repose sur les piliers de Selency : une démarche unique, authentique et durable.
Mais ce qui nous différencie réellement est notre capacité à prendre en considération l'existant dès la phase de conception, pour évaluer dès le départ les pièces et matériaux qui vont être conservés, réutilisés ou dirigés vers des filières de recyclage. Tout le projet sera ensuite défini en fonction.

Suite Lafayette, Moma Group © Selency
Comment sourcer du mobilier vintage dans l'hôtellerie tout en gérant les quantités et les aspects sécuritaires ?
Toutes les pièces vintage ne sont pas adaptées à un usage en hôtellerie car elles ne répondent pas aux normes en vigueur. Les luminaires, notamment, nécessitent tout un travail de remise aux normes pour s'aligner avec les critères actuels. Notre rôle, au Studio Selency, est justement de nous appuyer sur notre expertise pour identifier les postes où la seconde main a du sens et ceux où il est préférable de privilégier les fabrications récentes et le sur mesure.
Quels sont les types de pièces les plus plébiscitées ?
De manière générale, tous les objets de décoration s'adaptent sans difficulté au secteur. Ils habillent, apportent un supplément d'âme sans aucune contrainte. Les luminaires sont aussi très intéressants, à condition d'être remis aux normes. Aussi, toutes les pièces comprenant une partie textile ont un intérêt. Comme il sera indispensable de changer les tissus pour des matières qui respectent un certain cahier des charges, en termes de résistance à l'usure et au feu notamment, on peut facilement se tourner vers des choses en mauvais état et faire de belles affaires.
Vous êtes certifié B Corp, que signifie concrètement le label pour votre activité ?
La certification B Corp va au-delà du seul volet environnemental et intègre des critères sociaux et sociétaux. En ce qui concerne l'environnement, notre métier est de privilégier la seconde main dans la manière dont nous allons penser le projet. A l'inverse d'un architecte d'intérieur classique, qui va sourcer le réemploi et la seconde main en fonction de la conception, nous réalisons la conception en fonction du réemploi et de la seconde main. S'ils ne sont pas possibles, nous faisons appel à des fournisseurs qui répondent à un cahier des charges précis, avec des alternatives locales, composées du moins de produits chimiques possible.

Hôtel Cabane, Groupe Orso © Selency
Le studio a été lancé en septembre 2025 à temps plein et nous avons déjà des travaux prévus pour le mois de janvier. Pour d'autres projets, nous entamons actuellement la phase de conception. Mais, dans le passé, nous avons déjà travaillé sur plusieurs projets de curation dans l'hôtellerie et la restauration. Nous avons notamment sourcé plus de 1.000 pièces pour l'Abbaye des Vaux-de-Cernay.
Quel état des lieux faites-vous du marché de la seconde main pour l'ameublement et la décoration en France ?
Le marché de la seconde main se porte toujours bien en France et a de beaux jours devant lui. De plus en plus de clients accèdent à cette habitude d'achat et les sujets de friction sont moins nombreux. Dans un contexte chahuté pour le marché global du mobilier et de la décoration depuis deux ans, la seconde main tire son épingle du jeu. Chez Selency, nous sommes parvenus à mettre la société à l'équilibre après des mois assez difficiles, alors que de nombreux acteurs du secteur ont été malmenés.

Appartement Paris 9 © Selency
Comment réagissez-vous à l'essor des plateformes de fast-décoration et de fast-fashion ?
Nous les regardons le moins possible car notre combat n'est pas de casser les pratiques déloyales, mais de nous concentrer sur ce que nous savons faire de mieux : éduquer sur les vertus de la seconde main et du vintage. On essaie aussi de s'ouvrir à d'autres marchés alors que la situation est très tendue en France.
C'est toujours une très bonne question, il y a tellement de choses ! Le style Art déco revient en force avec de nombreuses pièces accessibles, qui vont prendre de la valeur dans les prochaines années. De manière générale, tout ce qui a un côté inattendu a de la valeur et permettra à un décor de se démarquer. C'est encore plus vrai dans un univers où la fast-fashion pousse à la standardisation de la décoration.