Immobilier : un projet de loi pour lutter contre les pratiques abusives du secteur

    Publié le 13 juin 2013 par G. N
    Le ministère du Logement a dévoilé quelques mesures portant sur l'immobilier. Le texte, qui devrait être présenté dans quelques semaines en conseil des ministres, entend lutter contre des pratiques abusives du secteur de l'immobilier en plafonnant les frais d'agence, réglementant l'activité des marchands de listes et encadrant les tarifs des syndics. Explications et réactions.
    Cécile Duflot, ministre de l'Egalité des territoires et du Logement, a dévoilé, ce mercredi 12 juin 2013, plusieurs mesures du futur projet de loi "Logement & urbanisme" qui doit être présenté en conseil des ministres d'ici au début du mois de juillet. Des propositions destinées à participer à la lutte contre des pratiques abusives constatées dans le secteur de l'immobilier. "Les abus de certains ont jeté le discrédit sur l'ensemble de la profession, et le projet de loi vise à rétablir la confiance avec les consommateurs", a déclaré la ministre lors d'une conférence de presse. "Tarifs injustifiés et excessifs, non-respect des obligations, opacité, coûts de transaction trop élevés sont autant d'éléments qui entravent l'accès au logement et pèsent in fine sur le budget des ménages", estime-t-on au ministère.
    Le gouvernement a donc choisi de "moderniser en profondeur l'ensemble de ce secteur", en demandant notamment un plafonnement des frais d'agences immobilières, une réglementation de l'activité des marchands de listes et un encadrement des tarifs des syndics. Une annonce bien accueillie par l'association nationale de Défense des consommateurs des usagers (CLCV): "Nous ne pouvons que nous réjouir des annonces de la ministre du Logement. En effet, il est temps d'assainir réellement cette profession qui a montré son incapacité à s'autoréguler et à faire le ménage parmi ses membres, contrairement à ce qu'elle indique depuis de nombreuses années". Et de tempérer : "Certes, les différents abus que l'on peut constater ne sont pas imputables à l'ensemble de la profession, mais ils n'en sont pas moins intolérables".

    La Fnaim choquée par la méthode

    Néanmoins, le son de cloche est différent du côté des professionnels : "Nous sommes choqués par la façon de procéder", nous confie Jean-François Buet, le président de la Fnaim. "Cela fait maintenant 8 mois que nous travaillons avec le ministère. Nous étions prévenus des orientations mais d'apprendre ce matin, par voie de presse, que madame Duflot annonce vouloir réglementer le fonctionnement des agences immobilières est très désagréable. Nous ne sommes pas sûrs d'avoir été entendus et nous avons le sentiment qu'on s'est servi de nous. On n'agit pas comme ça avec des partenaires !", poursuit le responsable de la fédération nationale de l'immobilier.
    Sur le projet de loi en lui-même, Jean-François Buet se montre plus mesuré : "Il y a de bonnes choses que nous réclamions depuis longtemps, notamment sur la formation. Nous avons été entendus sur l'importance de 'l'état des lieux', dont l'essentiel est qu'il soit bien fait. La loi prévoit un état de lieux normé ce qui réduira le nombre d'abus et de dysfonctionnements".
    Mais d'autres mesures inquiètent les professionnels. "Notre insatisfaction porte sur plusieurs points. Sur le calcul et la répartition des honoraires de location par exemple, qui seront supportés uniquement par le propriétaire-bailleur. Ce n'est pas équilibré du tout !", s'insurge le président de la Fédération nationale immobilière. "Si le bailleur voit ses loyers encadrés, qu'il est soumis à une pression fiscale plus forte, qu'il est obligé de faire des travaux pour être aux normes et qu'en plus, on lui fait payer des frais supplémentaires on va simplement obtenir une désaffection de la location", s'inquiète Jean-François Buet qui redoute une baisse de l'intérêt des mises en location, qui serait contre-productive. "Et pour les locataires, il y aurait une baisse des honoraires mais aussi un service a minima, ne générant aucune sécurité. En passant de particulier à particulier pour éviter des frais, les locataires se retrouvent sans garantie", plaide le président de la Fnaim.
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    Immobilier : un projet de loi pour lutter contre les pratiques abusives du secteur

    "Je ne céderai pas à des hauts cris", annonce la ministre

    Le projet de loi présenté ce mercredi comporte également un volet sur la limitation des prestations particulières facturées par les syndics. Là encore, Jean-François Buet réagit : "Il y aura finalement moins de services proposés. C'est une vision réductrice des choses. La solution serait de laisser libre cette liste des prestations mais de plafonner certaines d'entre elles, de les tarifer et de les encadrer. Mais pas de les exclure".
    Concernant les comptes bancaires séparés pour toutes les copropriétés gérées par un syndic, qui risque d'entraîner des frais de gestion supplémentaires, le président de la Fnaim propose une alternative : "Il faudrait mettre en place un extranet pour que les membres d'une copropriété aient accès aux comptes 24 heures sur 24. Mais obliger à avoir un compte séparé entraînera une complexité accrue, une surcharge de travail et n'apportera pas de sécurité supplémentaire".
    Quant au mandat exclusif partagé, rien dans le texte de loi ne semble évoluer, contrairement aux suppliques de la Fnaim. "C'est pourtant la meilleure façon de maîtriser le marché. Aujourd'hui le mandat exclusif ne peut pas être renouvelé au-delà de 3 mois, alors que les notaires bénéficient d'un délai de 6 mois, ce qui constitue une inégalité de traitement. Nous espérions au moins obtenir la possibilité de tacite reconduction mais elle n'a pas été évoquée", conclut Jean-François Buet, dépité.
    De son côté, Cécile Duflot a estimé que "tous ceux qui sont dans un esprit de professionnalisme ne seront pas maltraités par cette loi". Face aux critiques, notamment de la fédération immobilière qui s'inquiète de la mise en place de ces mesures, la ministre a tenu à rester ferme : "Je sais exactement ce qu'il en est de la situation. Je ne cèderai pas à des hauts cris". Un propos qui semble réjouir l'association nationale de Défense des consommateurs des usagers (CLCV) : "Finalement, le projet de loi en cours d'élaboration et qui devrait être présenté dans les jours à venir, semble, du moins sur ces sujets, aller dans le bon sens". Et d'ajouter : "Loin de « dégoûter les propriétaires », comme d'aucuns le pensent, ce texte permettra, au contraire, de rétablir la confiance entre le consommateur et les professionnels, lesquels n'ont pas su démontrer qu'ils pouvaient apporter une réelle plus-value".
    Le projet de loi devrait être présenté en conseil des ministres le 26 juin prochain.
    "Je ne céderai pas à des hauts cris", annonce la ministre
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