Interview de Philippe van de Maele, président de l'Ademe : Vers Copenhague

    Publié le 9 novembre 2009 par Propos recueillis par Carine Lauga
    A l'issue de la signature de la convention "Les Pros de la performance énergétique" sur le salon Batimat, Philippe van de Maele est revenu sur les objectifs et attentes de Copenhague et a dressé un bilan des multiples actions de l'Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l'Energie en faveur du bâtiment. Interview.
    Maison à part : Vous venez de signer, avec Didier Ridoret, Benoist Apparu, Valérie Létard et Philippe Pelletier, la convention "Les Pros de la performance énergétique". Quelle est la nature réelle de cet engagement ?
    Philippe van de Maele : C'est un moment important pour le Plan Bâtiment en général, qui marque la mobilisation de tout le monde. Le développement durable par nature est la vision globale et de plus en plus transversale de tous les sujets et on a la même chose dans le bâtiment, où l'enjeu majeur est la réhabilitation. Il est également important que les normes dans le neuf soient très élevées. La rénovation représente un énorme chantier : 31 millions de logements, 870 millions de mètres carrés. Pour pouvoir répondre aux interrogations et demandes des maîtres d'ouvrage, assurer et garantir une forme de performance énergétique plus globale - et pour atteindre notre objectif majeur qui est celui du facteur 4 (réduction par 4 les émissions de gaz à effet de serre, ndlr) - il faut pouvoir leur offrir une démarche globale. C'est l'objet de cette convention : avoir des professionnels qui ont une vision globale des problématiques et qui peuvent proposer un service global. N'oublions pas qu'avec « Les Pros de la performance énergétique », il y a une notion de garantie de performance. Il faut qu'on arrive à maintenir l'idée même qu'on puisse travaille sur plusieurs bouquets de travaux simultanément. On a donc besoin d'avoir une démarche d'offre globale, de l'architecte ou bureaux d'études aux entreprises. Toute la filière doit se mobiliser, d'une part par un engagement réel - et la FFB le prouve aujourd'hui - et, d'autre part, cela signifie aussi beaucoup de formation des entreprises, des artisans (l'Ademe soutient aussi la démarche Eco-artisan de la Capeb, ndlr) pour que cette démarche globale d'offre, de réflexion et de conseils soit le cœur de la problématique de la rénovation énergétique du bâtiment.
    Maison à part : Quel est le rôle de l'Ademe au sein de cet engagement ?
    Ph. van de Maele : L'Ademe accompagne le Plan Bâtiment, elle est en permanence à ses côtés sur le sujet de la réhabilitation, ainsi que sur celui de la précarité énergétique. C'est un thème important car il faut toujours rappeler que le développement durable est un enjeu économique, environnemental et sociétal. Ce dernier est devenu de plus en plus majeur - on a des gens qui dépensent près de 10% de leurs revenus uniquement pour la consommation d'énergie de leur foyer. Avec les évolutions assez inévitables du prix de l'énergie, des ressources qui ne sont pas inépuisables, une consommation très importante, il faut cesser de mettre en difficulté les plus fragiles et les plus précaires, et donc arriver à travailler auprès des plus démunis. D'où notre collaboration étroite avec le Plan Bâtiment et avec les architectes, à la base de tous les projets de logements.
    Maison à part : Comment mobiliser la profession des architectes aux différents problèmes que vous évoquez ?
    Ph. van de Maele : L'Ordre des architectes et le syndicat des architectes sont assez mobilisés sur ce sujet. Toutefois, il y a un énorme travail à effectuer sur la formation. D'abord, sur la formation initiale des architectes, pour laquelle nous avons, à l'Ademe, pris des contacts avec des écoles d'architecture pour que la notion d'urbanisme durable prenne tout son sens. Toute la chaîne du secteur du bâtiment doit se mobiliser. L'Ordre a également lancé, en collaboration avec l'Ademe, des « clips de débat » destinés aux architectes, mais aussi de nombreuses réunions de travail et de sensibilisation. Nous sommes dans une dynamique où le bâtiment est le monde qui a démarré le plus vite.
    Maison à part : L'Ademe veut aussi beaucoup sensibiliser le grand public sur les comportements "durables". Quid de vos actions ?
    Ph. van de Maele : En effet, le comportement et les gestes sont essentiels. On met l'accent sur cela, car on estime que 20% des consommations sont dues à des comportements non optimums. Pour nous, tout est à faire en parallèle : le geste ne sera durable que s'il s'accompagne, dans le temps, d'investissements.
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    Interview de Philippe van de Maele, président de l'Ademe : Vers Copenhague

    La formation: clé de voûte de l'avenir du Bâtiment

    La formation: clé de voûte de l'avenir du Bâtiment - ademe
    La formation: clé de voûte de l'avenir du Bâtiment - ademe © CL
    Maison à part : A ce jour, quelque 50.000 Eco-PTZ ont été contractés. Cela vous satisfait-il ?
    Ph. van de Maele : Oui, surtout que le niveau d'investissement constaté n'est pas le minimum. On pouvait penser que les gens n'iraient pas sur les plus gros bouquets, mais le prêt moyen affichent des montants de 17-18.000 €. Cela signifie qu'au départ, les propriétaires s'engagent sur des démarches assez globales. Et les professionnels l'ont bien compris, en préconisant des solutions adaptées. L'enjeu, c'est vraiment la globalité.
    Maison à part : Qu'attendez-vous du sommet de Copenhague qui se tiendra en décembre prochain ? Quel est votre position par rapport aux comportements de pays comme la Chine ou l'Inde ?
    Ph. van de Maele : Tout d'abord, il y aura énormément d'enjeux à Copenhague. Le premier, c'est que les pays les plus pollueurs s'engagent vraiment. L'Europe l'a fait. Le Japon, les Etats-Unis et les autres pays riches doivent aussi s'engager, c'est en tout cas la volonté de Barack Obama. Le second gros enjeu de Copenhague, c'est le souhait que les pays riches participent au développement des pays "pauvres". Il y a la partie "financière", la plus facile à mettre en place, mais cela repose surtout sur un véritable changement de comportement à opérer. Ce qui sera moins aisé.
    Quant à la Chine et l'Inde, qui seront présents bien sûr, ils font en effet partie des plus gros émetteurs de Co2. Avec ses 1.3 milliard d'habitants, la Chine reste très mobilisée sur l'énergie dont la consommation ne cesse d'augmenter. Il s'agit d'un vrai problème dans ce pays. Leur discours, c'est : "On a besoin d'une croissance en énergie, ne serait-ce que pour augmenter le niveau de vie moyen de nos concitoyens"...
    Maison à part : Les pays en voie de développement vont devoir opérer une vraie métamorphose. Quand cela sera-t-il visible dans les faits ?
    Ph. van de Maele : Cela mettra 10 ans, voire 20 ans ! La notion du temps est primordiale. On ne change pas de comportement du jour au lendemain ! Et c'est la même chose en France, mais on a déjà des objectifs à 2020, rappelons-le. Avant d'éduquer et sensibiliser les différentes filières du monde du bâtiment, et d'arriver à avoir une démarche globale vis-à-vis du client, cela demandera quelques changements de mentalité, mais le pays s'est engagé dans cette voie. Là encore, la formation est la clé de voûte de cet engagement.
    Maison à part : Comment cela s'est-il ou va-t-il s'organiser dans la filière bâtiment et quels seront les besoins en formation ?
    Ph. van de Maele : Les jeunes vont s'y mettre plus facilement, c'est sûr, car ils sont plus sensibles aux problématiques de développement durable. Les personnes âgées y sont sensibles pour leurs petits-enfants. Les femmes le sont de manière générale. En revanche, les hommes de 35-49 ans le sont beaucoup moins et cela demandera plus de temps pour les "convertir".
    Côté formation, l'Ademe travaille avec les Maisons de l'Emploi, pour pouvoir réunir l'ensemble des partenaires de la formation conjointement sur une vision des besoins de formation sur un bassin d'emplois donné, comme, par exemple, en région Lorraine ou en Pays Basque. L'idée est d'arriver à définir les besoins de formation dans le bâtiment et de les adapter aux entreprises. C'est un vrai travail de partenariat, une notion qui plaît bien à l'Ademe, pour que tous les acteurs de la formation s'organisent pour répondre aux 120.000 (d'ici 2012) à 400.000 emplois nécessaires pour mener à bien le programme de rénovation du bâtiment en France. L'Ademe, qui est le bras armé du Grenelle de l'environnement, est là pour pouvoir déployer sur l'ensemble du territoire l'ensemble des engagements du Grenelle en matière de bâtiment.
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