Petites surfaces : vers une taxe contre les loyers abusifs

    Publié le 10 mars 2011
    Le secrétaire d'Etat au Logement a indiqué qu'un dispositif était à l'étude pour forcer les propriétaires de chambres de bonnes et très petites surfaces à ne pas les louer au-dessus de 40 euros le mètre carré. Une annonce qui n'a pas manqué de susciter des réactions.
    Benoist Apparu veut taxer les propriétaires louant des chambres de bonnes et très petits logements pour des montants abusifs. Le secrétaire d'Etat au Logement a indiqué vouloir appliquer une taxe sur tout loyer supérieur à 40 euros le mètre carré, pour une surface inférieure ou égale à 13 m2. Cette disposition serait inscrite dans la prochaine loi de finances, pour une application dès janvier 2012. "Certains propriétaires demandent plus de 90 euros par mètre carré", soit 900 euros pour une chambre de bonne de 10 m2 équipée seulement d'un point d'eau, "c'est totalement abusif", a déclaré Benoist Apparu à l'AFP.
    Même si l'exemple donné par le secrétaire d'Etat est caricatural - une annonce comme celle-ci semble en effet anecdotique : en parcourant les sites de petites annonces immobilières les plus utilisés, on trouve que la plupart des locations de chambres entre 9 et 13 m2 à Paris (tous quartiers confondus) sont affichées à des prix moyens compris entre 400 et 600 euros, des prix déjà suffisamment abusifs ! - le prix de ce type de bien, en particulier dans les grandes villes et à Paris, est très élevé, les petites surfaces étant très prisées du fait d'un parc locatif saturé. Dans la capitale, le prix moyen de la location au mètre carré est de 23 euros, mais il cache de forte disparités entre les grandes et petites surfaces, dont les prix s'élèvent ainsi facilement au-delà de 40 euros le mètre carré.

    Combler le manque de sanctions

    Le dispositif à l'étude au gouvernement serait une taxe dissuasive, qui s'appliquerait aux montants perçus au-delà de ce seuil des 40 euros/m2. "40 euros, cela reste encore élevé, mais il faut trouver un équilibre, pour empêcher que les propriétaires réunissent les chambres de bonne pour en faire un appartement", a expliqué Benoist Apparu. Il n'a rien dit sur les studios, dont les prix au mètre carré sont également très hauts. En revanche, il a indiqué que le gouvernement allait réfléchir à des sanctions pour les logements ne respectant pas la loi Carrez. Cette dernière, qui s'applique depuis peu au marché locatif, oblige le bailleur à faire métrer son logement mais "la loi a oublié de prévoir des sanctions en cas de manquement dans le locatif. Nous allons y remédier", a précisé le secrétaire d'Etat. Ainsi, une personne s'apercevant que la surface Carrez de son logement est inférieure à celle annoncée pourrait négocier une baisse du loyer.

    Une "micro-mesure" ?

    La CLCV a réagit à cette annonce en rappelant que les loyers avaient augmenté en moyenne de 3,2% par an depuis 1998, et qu'il était "urgent de prendre toutes les mesures qui s'imposent afin que se loger ne devienne pas un luxe mais bel et bien un droit". L'association de consommateurs préconise notamment un gel des loyers dans les secteurs social et privé, et un encadrement des loyers à la relocation.
    Selon Jean Perrin, président de l'Union nationale de la propriété immobilière (UNPI), une sanction sous forme de taxe n'est pas la meilleure solution. "Il aurait mieux valu opter en faveur d'incitations fiscales, et de toute façon, cela ne règle pas le problème de fonds, soit la pénurie de logements", estime-t-il.
    La suite des réactions en page suivante, notamment celle des étudiants et des politiques.
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    Réactions - suite - Petites surfaces : vers une taxe contre les loyers abusifs

    Des étudiants "oubliés" ?
    Les étudiants quant à eux ne sont pas plus enthousiasmes : la taxe proposée par Benoist Apparu est "une mesure qui va dans le bons sens mais ne réglera pas durablement la crise du logement étudiant (...) [elle] ne règle ni la pénurie des logements, ni les difficultés financières liées à l'accès à un logement autonome" regrette l'Unef, l'un des principaux syndicats étudiants dans un communiqué. La Confédération étudiante va encore plus loin : pour elle, les étudiants sont tout simplement "oubliés" : la taxe ne sera pas dissuasive et elle ne change pas les dépenses "logement" de l'étudiant. Jeudi Noir caricature de son côté le secrétaire d'Etat en "ministre des loyers indécents" et déplore "le recul de Benoist Apparu qui, malgré ses promesses, refuse toujours de plafonner les loyers indécents."

    Consternation chez les politiques

    Côté politiques, les réactions ont été encore plus vives. Le maire de Paris, Bertrand Delanoë se demande "comment ne pas être consterné face à une telle mesure", qui sera pour lui "sans portée", car elle ne concernerait qu'une faible partie des locations et "laisse entendre qu'un loyer de 40€ par m2 serait acceptable". Et de demander de nouveau un véritable "encadrement des loyers à la relocation."
    Europe Ecologie dénonce une "vaine agitation" : "Le fossé est énorme entre la gravité de la situation et la faiblesse des mesures proposées par le gouvernement. Si monsieur Apparu est d'accord pour reconnaître l'indécence de certains loyers, qu'il prenne ses responsabilités en les plafonnant!", précise également Cécile Duflot. Au PS, la secrétaire nationale chargée du logement, Nathalie Perrin-Gilbert, a déclaré que la taxe proposée par le secrétaire d'Etat "n'est qu'un effet de communication de plus", ajoutant "Le gouvernement ne prend toujours pas à bras le corps les questions relatives à la cherté du logement, à la hausse continue et exponentielle des charges qui pèsent sur les ménages, locataires ou propriétaires, ou au mal logement".
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