La tuile terre cuite : entre tradition et modernité

    Publié le 10 juin 2009 par Propos recueillis par Céline Chahi
    Toiture terre cuite
    Toiture terre cuite © C.Chahi
    Matériau introduit en France à l'époque romaine, la terre cuite reste très largement représentée dans le paysage architectural français. Comment expliquer une telle longévité alors que la concurrence ne cesse de se développer ? Thierry Voland, manager du Service tuiles au Centre Technique de matériaux naturels de construction, livre son analyse...
    Maison à part : Depuis quand utilise-t-on la terre cuite pour couvrir les toits des maisons ?
    Thierry Voland : Selon toute vraisemblance, les tuiles en terre cuite sont apparues en Chine entre 4.000 et 5.000 ans avant Jésus-Christ. Elles sont venues remplacer les bambous fendus se chevauchant utilisés en guise de couverture. Entre les XIème et XIIème siècles, leur usage s'est répandu en Mésopotamie puis en Egypte, au Moyen-Orient et en Méditerranée. Ce sont les romains qui vont en généraliser l'emploi à travers tout l'Empire, Gaule comprise bien sûr, où les modes de construction traditionnels s'en trouveront bouleversés.
    MAP : La terre cuite est en effet parvenue à détrôner les revêtements existants : chaume, bois, lauze...
    T. V : Certains d'entre eux persistent mais restent marginalement utilisés par rapport à la terre cuite, qui représente aujourd'hui 80% du marché des petits éléments de couverture en France. Elle domine dans un grand tiers Sud, dans une partie du Nord et de l'Est mais pas en Bretagne où la tradition de l'ardoise perdure. Dans les autres régions, elle reste également leader malgré la concurrence des toitures en métal, des tuiles béton, des bardeaux bitumineux, des plaques en fibrociment et des toitures végétalisées.
    MAP : Comment expliquez-vous qu'un matériau apparu en des temps si reculés trouve encore se place dans le paysage architectural ?
    Thierry Voland, manager du Service tuiles au Centre Technique de matériaux naturels de construction.
    Thierry Voland © C.Chahi
    Thierry Voland, manager du Service tuiles au Centre Technique de matériaux naturels de construction.
     
    T. V : La tuile terre cuite est un matériau qui a su évoluer avec son temps et se renouveler à la fois sur le plan technique et esthétique. Beaucoup de progrès ont été faits par les fabricants pour faciliter la pose. La tuile canal traditionnelle*, par exemple, a évolué vers des modèles auto-blocants ou présentant des tenons, de nouveaux systèmes d'accrochage particulièrement efficaces, puisqu'ils lui évitent de glisser après avoir été posée. On a également vu récemment émerger sur le marché une multitude d'accessoires dédiés à la toiture terre cuite, notamment les closoirs, dont l'utilisation s'est systématisée et qui, disposés au niveau des points singuliers de la toiture, sous les tuiles de faîtage ou sur les noues, évitent les infiltrations tout en permettant à l'air de s'évacuer de manière naturelle.
    MAP : Qu'en est-il sur le plan esthétique ?
    T. V : Il existe aujourd'hui des centaines de coloris et d'aspects différents proposés par les fabricants. Ils sont obtenus par des procédés industriels complexes de poudrage, d'engodage parfois complétés par un sablage. Tuiles aux couleurs irisées, à l'aspect métallisé ou imitant la patine des tuiles anciennes... Autant de possibilités créatives offertes aux architectes. Mais le consommateur y a aussi gagné puisque l'apparition de ces produits s'est accompagnée d'une amélioration de leurs qualités, allongeant la durée de la vie des toitures et réduisant leur coût d'entretien.
    MAP : Et quelles sont justement les principales qualités du matériau terre cuite ?
    T.V : La terre cuite est un matériau très solide. Pour preuve, on peut marcher dessus sans se mettre en danger et sans mettre en péril la solidité de l'édifice. Elle est également inflammable, imperméable et offre une bonne résistante au gel, mais aussi l'épreuve du temps. Certains ouvrages construits à l'antiquité sont d'ailleurs encore parfaitement conservés.
    MAP : Une liste de propriétés qui pourrait peut-être prochainement s'allonger...
    T.V : Oui, effectivement. Nous sommes actuellement en train de travailler avec des équipes d'universitaires pour rendre la tuile terre cuite autonettoyante. L'idée est qu'elle puisse être capable de se débarrasser d'elle-même des micro-organismes qui la colonisent. On peut également imaginer une tuile qui réagisse avec son environnement, qui change d'aspect en fonction de la météo, qui joue avec la réverbération ou encore qui n'a pas le même comportement en été qu'en hiver... Des pistes de réflexion certes intéressantes mais qui méritent encore d'être approfondies, notamment pour connaître leur faisabilité.
    * Voir notre article consacré aux différents types de tuiles.
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