Tremblement de terre : pourra-t-on bientôt anticiper les grands séismes ?

    Publié le 21 février 2011 par Pauline Polgár
    séisme d'Izmit - Turquie
    séisme d'Izmit - Turquie © Après le séisme, Gölcük, 1999 - ph. GLC, DR
    Des chercheurs du CNRS et leurs homologues turcs ont décelé pour la première fois des signaux sismiques particuliers précédant le tremblement de terre d'Izmit (Turquie) de 1999. Une "phase de préparation" qui pourrait se répéter avant d'autres séismes de ce type et qui, observée, pourrait prédire, plusieurs dizaines de minutes avant, la rupture d'une faille.
    44 minutes, qui se sont révélées déterminantes. Les chercheurs du CNRS* et leurs collègues de l'Observatoire de Kandili (Istanbul) et du centre de recherche de Tubitak ont détecté pour la première fois, l'existence, lors du tremblement de terre d'Izmit, survenu en Turquie en 1999, "d'une période de préparation de 44 minutes avant la rupture de la faille", annonce le CNRS dans un communiqué jeudi 17 février - étude publiée dans la revue Science. Une information capitale qui ouvre la voie à une anticipation des séismes du même type et donc, à une amélioration des dispositifs d'alerte.
    Le 17 août 1999 à 3h02 et pendant 45 secondes, la terre tremble dans le nord-ouest de la Turquie. Le séisme, de magnitude 7,6 sur l'échelle ouverte de Richter, dévaste totalement la région, notamment autour des villes de Gölcück (où a été déterminé l'épicentre) et d'Izmit. On dénombrera près de 20.000 morts et plusieurs dizaines de milliers de blessés et de sans abri. "Au XXe siècle, neuf séismes de ce type se sont manifestés sur la faille Nord Anatolienne, l'une des grandes failles les plus actives au monde", expliquent les scientifiques. Depuis ce mois d'août 1999, cette dernière est notamment au centre de toutes les attentions des scientifiques : les sismologues étudient, en effet, les données recueillies lors de ce grand tremblement de terre - dit d'Izmit - "l'un des mieux enregistrés au monde".
    <i>"Exemple d'enregistrement du mouvement du sol vingt minutes avant le tremblement de terre. Le sol vibre de façon continue avec une amplitude qui est de l'ordre de quelques microns." </i>
    Exemple d'enregistrement séisme © Michel Bouchon - CNRS
    "Exemple d'enregistrement du mouvement du sol vingt minutes avant le tremblement de terre. Le sol vibre de façon continue avec une amplitude qui est de l'ordre de quelques microns."
     Une découverte majeure qui permet d'espérer anticiper les grands séismes
    Et c'est en étudiant de près ces enregistrements, qu'ils ont observé "un signal sismique très particulier", jamais mis en lumière jusqu'alors : "la répétition de la même vibration pendant 44 minutes" précédant le séisme proprement dit. Une vibration continue, indétectable par la population locale, qui augmenterait progressivement en intensité jusqu'à la rupture. "Son analyse indique qu'il est causé par le glissement lent et saccadé de la faille au niveau de la zone où le séisme se déclenchera", explique le CNRS. Pour les chercheurs, il s'agit là d'une découverte majeure. En effet, jusqu'à présent, cette phase de "préparation du séisme" n'avait été envisagée qu'en théorie ou lors d'expériences en laboratoire, mais jamais réellement observée. Maintenant que les scientifiques ont réussi à isoler cette séquence d'enregistrements caractéristique, il n'est pas inopportun de penser que celle-ci "devrait vraisemblablement exister pour d'autres séismes, en particulier ceux du type d'Izmit". Et ainsi d'espérer pouvoir anticiper à l'avenir certains tremblements de terre, avant leur survenue.
    "Si de nouvelles observations viennent corroborer l'existence de cette phase de préparation pour d'autres tremblements de terre, elles permettraient d'espérer enfin prédire certains séismes plusieurs dizaines de minutes avant la rupture de faille", souhaitent les chercheurs. Sachant que, dans le cas des grands séismes, toutes les minutes comptent et sont bonnes à prendre...
    Retrouvez notre article : La France est-elle préparée à un tremblement de terre ?
    *Institut des Sciences de la terre (Grenoble 1 et Chambéry/IRD/LCPC), Instituts de Physique du globe de Strasbourg et de Paris, avec le soutien de l'Agence nationale pour la recherche.
    Extended Nucleation of the 1999 Mw 7.6 Izmit Earthquake. Michel Bouchon, Hayrullah Karabulut, Mustafa Aktar, Serdar Özalaybey, Jean Schmittbuhl, Marie-Paule Bouin. Science. 18 février 2011.
    NB : la photo de séisme illustrant cet article, a été prise lors d'opérations de secours menées à la suite du tremblement de terre d'Izmit (et est protégée d'un copyright avec une utilisation accordée exclusivement à Maison à part et Batiactu).
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