Décentralisation, une réforme en trois volets

    Publié le 22 avril 2013 par Sébastien Chabas
    Le projet de loi sur la Décentralisation, désormais découpé, en trois textes, réorganise clairement les compétences des collectivités locales et clarifient leurs relations avec l'Etat. Ainsi, la région devient "chef de file" pour le développement économique et les transports, alors que les Communautés de communes et d'agglomération se voient transférer l'élaboration du PLU. Décryptage.
    Après plus de huit mois de travail, et un dernier rebondissement, début avril, le projet de loi sur la Décentralisation est arrivé mercredi 10 avril sur la table du Conseil des ministres. Le Gouvernement a dû, en effet, revoir en catastrophe sa copie devant la colère des élus socialistes et associations d'élus et proposer une nouvelle architecture de la réforme : un projet de 124 articles scindé en trois projets de lois bien distincts : "Projet de loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles" ; "Projet de loi de mobilisation des régions pour la croissance et l'emploi et de promotion de l'égalité des territoires", "Projet de loi de développement des solidarités territoriales et de la démocratie locale".
    Tous les trois ont été présentés mais seule la première partie (55 articles) a vocation à être débattue au Palais du Luxembourg, dès le mois de mai prochain. Et en octobre, il examinera le deuxième texte dédié aux régions, puis le troisième, sur l'avenir des départements, communes et intercommunalités, avait affirmé, le 2 avril, Jean-Marc Ayrault, sans donner de date pour le dernier volet. Ainsi, l'ensemble de la réforme, ne sera pas adopté définitivement par le Parlement d'ici à la fin 2013, l'objectif initial. Ni même d'ici aux municipales de mars 2014, mais plutôt avant les sénatoriales de septembre 2014, pronostiquaient, par exemple, des élus, interrogés cette semaine aux Assises des maires d'Ile-de-France (Amif).

    La région devient "chef de file"

    Par conséquent, le premier projet de loi (55 articles) redéfinit la clause de compétence générale des départements et des régions qui avait été supprimée par la loi du 16 décembre 2010. "Il instaure des collectivités territoriales 'chefs de file' : à la Région, le développement économique et l'organisation des transports ; au Département, l'action sociale, l'aménagement numérique et la solidarité des territoires ; à la commune, les compétences relatives à la qualité de l'air et à la mobilité durable." Fait majeur : dans chaque région est également créée une conférence territoriale de l'action publique qui doit adopter un pacte de gouvernance.

    Le statut de métropole désormais créé

    Ainsi, une métropole de plus de 400.000 habitants pourra exercer, à partir du 1er janvier 2017, à l'intérieur de son périmètre, de très nombreuses compétences en lieu et place du département -fonds de solidarité pour le logement ; gestion de routes classées ; zones d'activité-, précise le ministère de la réforme de l'Etat, de la Décentralisation et de la fonction publique. Et d'ajouter : "Elle pourra également exercer, par accord, des compétences régionales." Enfin, à sa demande, l'Etat pourra lui transférer, outre de grands équipements et infrastructures, la compétence relative au logement étudiant.
    De nombreuses dispositions spécifiques sont justement mises en place, particulièrement pour l'Ile-de-France où la métropole de Paris sera créée au 1er janvier 2016. Dotée d'un fonds d'investissement, la métropole en question devra mettre en œuvre un projet métropolitain de l'habitat et de l'hébergement. Par ailleurs, la métropole de Lyon sera créée au 1er avril 2015, en lieu et place du département et celle d'Aix-Marseille-Provence au 1er janvier 2015, souligne le ministère. Quant aux communautés urbaines, elles deviennent complètement compétentes pour les ZAC, les réserves foncières, la politique du logement et de l'habitat.
    Découvrez la suite de l'article en page 2
    Décentralisation, une réforme en trois volets

    Deux points non résolus : le logement et l'urbanisme

    petite commune
    petite commune © M D MAP
    Parmi les principales préoccupations des élus, le logement et l'urbanisme font partie des sujets majeurs du premier projet (55 articles). Deux problèmes, en effet, économiques pourtant essentiels, surtout en Île-de-France où les élus affirment que la croissance du PIB de la région passera par une politique de "logement cohérente et volontariste". Toutefois, les élus sont sceptiques. La ministre Marylise Lebranchu les oblige, en effet, à se regrouper en intercommunalités (Ndlr : l'Île-de-France enregistre un retard conséquent par rapport aux autres régions) et transfère la compétence du plan local d'urbanisme (PLU) aux intercommunalités (PLUI). "Mais que deviendra un maire sans PLU ? , s'est de nouveau interrogé Michel Teulet, maire UMP de Gagny, président de l'AMIF. Et qu'en est-il du permis de construire ?"
    Les Communautés de communes et d'agglomération se voient transférer l'élaboration du PLU
    Cette mesure, très critiquée par les maires, devra s'appliquer dans les six mois après la promulgation de la loi. Toutefois des mesures transitoires sont déjà prévues : les communes ayant engagé une procédure d'élaboration, de révision, de modification ou de mise en compatibilité d'un PLU avant l'entrée en vigueur de la loi -et ayant achevé cette procédure dans un délai parallèle d'un an- pourront rester compétentes jusqu'à l'achèvement de cette procédure. "Au terme de ce délai, si les procédures n'ont pas abouti, les communautés de communes et les communautés d'agglomération deviennent de plein droit compétentes en matière de PLU", souligne le texte.
    Sont également abordés les transferts de compétences : transports dévolus aux régions -exploitation des lignes ferroviaires ; organisation des transports routiers ; schémas régionaux de l'intermodalité-; énergie, (Ndlr : la commune est compétente en matière de production d'électricité).
    Un rôle de formation et apprentissage appuyé dans les régions
    Le second projet de loi (33 articles), examiné dans quelques mois, sera dédié aux régions, qui deviennent le guichet unique en matière d'aide économique aux entreprises. Chaque région choisira ses orientations stratégiques dans le cadre d'un schéma de développement économique, d'innovation et d'internationalisation. Toutefois, la nouvelle responsabilité économique des régions devra s'articuler avec le rôle renforcé des métropoles (élaboration de leur propre régime d'aides aux entreprises en difficulté ou soutien des organismes de participation à la création ou à la reprise d'entreprises). Appuyée, aussi, dans son rôle en matière de formation -apprentissage, orientation, formation professionnelle-, la Région pourra se voir confier par l'Etat, à sa demande, tout ou partie de la gestion des fonds européens pour la période 2014-2020.
    A noter : l'article 17 a pour objectif de confier aux départements une mission plus complète en termes d'assistance technique : eau et assainissement ; voirie ; aménagement du territoire et habitat.

    Réactions contrastées des élus

    Sur le fond, les critiques des élus locaux sont, en effet, contradictoires, variant en fonction du maire d'une petite commune, d'une grande ville ou président d'une intercommunalité, président de conseil général ou de conseil régional. "La satisfaction" face à l'étalement du calendrier domine à l'Association des maires de France (AMF), tandis que le projet initial laissait "peu de place aux communes". A l'inverse, l'Assemblée des départements de France (ADF) juge de nouveau "inacceptable" que le département soit "maintenant considéré comme un sujet annexe". Et enfin, l'Assemblée des communautés de France (AdCF)) exprime "sa crainte d'un enlisement du nouvel acte de décentralisation" et "son extrême perplexité" sur le nouveau découpage de la réforme, trouvant curieux de dissocier métropoles et intercommunalités".
    Deux points non résolus : le logement et l'urbanisme
    Articles qui devraient vous intéresser
     
    Recevez gratuitement
    La newsletter Maison à Part
    L'e-magazine de l'habitat sous tous les angles
    Vous pouvez vous désabonner en un clic