Financer les travaux de sa copropriété grâce à la surélévation

    Publié le 28 janvier 2019 par Stéphanie Thibault
    Construire en hauteur est une bonne solution pour lutter contre la pénurie de logements. Mais la surélévation est aussi synonyme de nombreux avantages pour les copropriétaires, qui peuvent ainsi obtenir l'argent nécessaire pour financer de gros travaux. Explications.
    Alors que la place disponible en ville se fait de plus en plus rare, en particulier dans les zones à forte densité urbaine, surélever un immeuble est une solution intéressante pour les copropriétés. Construire en hauteur permet en effet de créer des mètres carrés supplémentaires, et donc de nouveaux logements. C'est aussi un excellent moyen de générer des revenus pour financer des travaux de rénovation, et valoriser le patrimoine immobilier existant.
    "Surélever permet également aux copropriétaires de faire des économies, sur les charges de copropriété, mais pas seulement. Cela évitera par exemple d'avoir à refaire la toiture plus tard, une dépense qui pèse souvent très lourd sur le budget" note Gilles Frémont, président et fondateur de l'Association nationale des gestionnaires de copropriétés.
    Les commerçants surélevaient déjà leurs boutiques au XVIIe siècle pour pouvoir se loger. La pratique n'est donc pas nouvelle, mais elle bénéficie depuis quelques années de règles plus souples pour encourager la rénovation thermique des immeubles.

    Qu'est-ce qu'une surélévation ?

    Entreprendre des travaux de surélévation d'un immeuble signifie créer un ou plusieurs niveaux supplémentaires. En construisant un ou des étages en plus, on augmente ainsi la surface habitable et on crée de nouveaux lots de copropriété.
     
    Attention : la surélévation se distingue d'un simple aménagement de combles ! La jurisprudence de la Cour de cassation (6 mars 1991) est très claire sur ce point. "Une surélévation implique nécessairement un rehaussement de la ligne de faîtage du toit. Il s'agit sinon d'un redressement de combles, qui peut nécessiter de créer de nouvelles ouvertures, mais ce n'est en aucun cas une surélévation" précise Gilles Frémont.
    En pratique, cela veut dire pour la copropriété, le plus souvent, vendre son droit à surélever l'immeuble. Le droit à construire appartient en effet au syndicat des copropriétaires, qui peut soit décider de réaliser les travaux lui-même, soit de céder son droit à construire à un tiers (par exemple un promoteur).

    Surélévation d'une copropriété : les avantages

    Le principal avantage est bien sûr financier. Vendre son droit à surélever permet au gestionnaire de copropriété de dégager des ressources importantes. "Le prix de vente est alors réparti entre les différents copropriétaires, et peut servir à financer des travaux de rénovation, ravalement de façade, réhabilitation thermique de l'immeuble, remplacement de la chaudière, etc..." indique Gilles Frémont.
     
    Vendre son droit à surélever : combien ça rapporte ?
    Il n'existe aucune règle précise en la matière et le prix de vente du droit à surélever varie d'un projet à l'autre. "Il est calculé en fonction du prix du mètre carré, mais il dépend aussi du coût de la construction" indique Gilles Frémont. Il est donc variable selon la ville, et l'immeuble concerné. L'opération reste malgré tout intéressante pour la copropriété, qui s'assure ici de pouvoir financer les travaux qu'elle a besoin de réaliser.
    Surélever un immeuble entraîne aussi la création de nouveaux lots de copropriété. Et qui dit nouveaux lots, dit augmentation du nombre de tantièmes. Concrètement, cela se traduit par une plus large répartition des charges de copropriété, et donc une réduction de leur montant pour chaque copropriétaire.
    La réhabilitation du bâtiment permet également d'en prolonger la durée de vie. Les projets de surélévation participent donc à la valorisation du patrimoine immobilier, c'est d'ailleurs l'un des arguments du législateur pour encourager ce type de travaux. Gilles Frémont conseille tout de même de bien étudier tous les paramètres avant de se lancer. "Une surélévation peut en effet nécessiter d'autres travaux, comme la création d'un accès vers le ou les nouveaux étages. Il faudra alors prévoir un prolongement de l'escalier ou l'installation d'un ascenseur, ou encore le prolongement des colonnes de chauffage" prévient le spécialiste.

    Les inconvénients de la surélévation

    Il s'agit essentiellement d'inconvénients liés aux travaux eux-mêmes, qui peuvent durer plusieurs mois. Sont donc à prévoir des nuisances de chantier comme le bruit, la présence d'un échafaudage, ou encore, à terme, l'augmentation de la population dans l'immeuble. "Mais ce sont des inconvénients à relativiser" estime Gilles Frémont, "car on va profiter de la présence de l'échafaudage pour faire le ravalement de la façade ou améliorer l'isolation par exemple".

    Surélever une copropriété : quelles conditions ?

    Encouragée dans les grandes villes, notamment à Paris, pour lutter contre la pénurie de logements, la surélévation profite depuis quelques années d'un assouplissement des règles d'urbanisme. S'il reste des règles en matière de hauteur, de gabarit ou encore d'architecture, le coefficient d'occupation des sols (COS) a par exemple été supprimé par la loi ALUR du 24 mars 2014. Le droit de veto dont disposait le copropriétaire du dernier étage a également été supprimé et remplacé par un droit de priorité pour racheter le lot créé. "La surélévation est d'ailleurs souvent à son initiative" souligne Gilles Frémont. "Il propose à la copropriété de racheter le droit à construire parce qu'il souhaite s'agrandir".
    Les immeubles dits "en dent creuse" se prêtent particulièrement bien à ce type de projets. Il s'agit d'un bâtiment dont la ligne de toit est située en contrebas par rapport à celle des immeubles mitoyens, mais la surélévation n'est pas limitée à ce cas de figure. "Les seules limites ici sont d'ordre techniques, architecturales ou juridiques" précise Gilles Frémont.
    Un tel projet nécessite en effet de s'assurer d'abord de sa faisabilité. Si la plupart des surélévations sont réalisées en bois, en verre ou en aluminium, des matériaux légers, il faut au préalable procéder à une étude du sous-sol et des fondations pour vérifier que l'immeuble pourra supporter une charge supplémentaire par exemple. Et la réalisation des travaux reste bien sûr soumise à l'obtention d'un permis de construire.

    Surélévation : la marche à suivre pour la copropriété

    Deux cas de figure s'offrent au syndicat des copropriétaires.
    >Soit il décide de réaliser les travaux lui-même. C'est alors à lui de tout gérer. Il devient maître d'ouvrage et devra se charger de toutes les démarches, mais aussi travailler avec un géomètre, faire appel à un architecte ou un bureau d'études, lancer les travaux... Cela signifie également que sa responsabilité juridique est engagée.
    >Soit il cède le droit à construire à un tiers. "Il est plus intéressant de faire appel à un promoteur qui va se charger de toute l'opération" indique Gilles Frémont. "C'est lui qui s'occupera de toutes les démarches, juridiques et administratives, de l'obtention du permis de construire, c'est lui aussi qui se chargera du suivi des travaux, et qui s'occupera enfin de la vente des nouveaux logements. Le gestionnaire de copropriété bénéficie ainsi d'un montage clé en main".
    Dans un cas comme dans l'autre, la surélévation doit être votée par l'assemblée générale des copropriétaires. La question doit donc être inscrite à l'ordre du jour et débattue. Si le syndicat de copropriété choisit de réaliser les travaux lui-même, un devis devra être présenté. S'il décide de céder son droit à construire, un prix devra être proposé.
    Les modalités de vote sont prévues par l'article 35 de la loi du 10 juillet 1965. La surélévation doit être votée dans les conditions prévues par l'article 26, et réunir la majorité des copropriétaires correspondant à 2/3 des voies. Toutefois, dans les villes où il existe un droit de préemption urbaine, c'est la majorité telle que définit par l'article 25 qui s'applique, soit une majorité simple.
    "Il faudra ensuite attendre le délai légal de contestation de deux mois suivant la notification du procès verbal avant de pouvoir lancer le projet, à l'initiative du gestionnaire de copropriété ou du promoteur dans le cas d'un acte de cession" précise enfin Gilles Frémont.
    Financer les travaux de sa copropriété grâce à la surélévation
    Articles qui devraient vous intéresser
     
    Recevez gratuitement
    La newsletter Maison à Part
    L'e-magazine de l'habitat sous tous les angles
    Vous pouvez vous désabonner en un clic