La Maison du Jardinier : l'oeuvre oubliée de Le Corbusier restaurée dans son état initial

    Publié le 11 septembre 2015 par Amélie Njaboum
    La Maison du Jardinier, dans le domaine de la Villa Savoye du célèbre Le Corbusier, s'offre une seconde vie grâce à une restauration pointue, respectant au détail près la vision de l'architecte. Une vision qui avait été altérée au fil du temps et des rénovations précédentes.
    Dans l'ombre de la fameuse Villa Savoye à Poissy (78), la Maison du jardinier de Le Corbusier a longtemps été l'oubliée de l'Histoire de l'architecture. Cette loge destinée à héberger le gardien de la maison et sa famille, est pourtant très représentative du style et de la philosophie de Le Corbusier.
    Construite en 1931, en même temps que la Villa Savoye, cette petite maison de 35 m2 est l'un des premiers exemples d'unité d'habitation de l'architecte, c'est d'ailleurs le seul exemple de logement minimum qu'il ait construit avant-guerre.
    Pour commémorer le cinquantenaire de la disparition de Le Corbusier, la loge du jardinier a donc bénéficié d'une rénovation totale dans son état initial. Après avoir subi de nombreuses altérations au fil des années et des rénovations, notamment celle menée par l'architecte Jean Dubuisson entre 1964 et 1967, le lieu avait perdu son âme et quelques-unes de ses particularités architecturales les plus marquantes.
    Analyse de photos, études des plans d'origine et sondages stratigraphiques ont permis à l'équipe d'architectes du Centre des Monuments Nationaux de restaurer la maison au plus près de ce qu'elle était en 1931. Couleurs, matériaux, menuiseries, tout a été refait dans le respect des principes formels et des choix initiaux de Le Corbusier.
    A l'occasion des Journées européennes du Patrimoine, la Maison du jardinier sera ouverte à la visite pour la première fois à partir du 19 septembre 2015.
    Découvrez, en pages suivantes, les détails de cette restauration architecturale.
    La Maison du Jardinier : l'oeuvre oubliée de Le Corbusier restaurée dans son état initial

    Une loge à laquelle ont été appliqués les principes architecturaux de Le Corbusier

    Une loge à laquelle ont été appliqués les principes architecturaux de Le Corbusier - La Maison du Jardinier de Le Corbusier
    Une loge à laquelle ont été appliqués les principes architecturaux de Le Corbusier - La Maison du Jardinier de Le Corbusier © Amélie Njaboum - MAP
    Comme posée à l'entrée du domaine de la Villa Savoye, cette loge est d'une ressemblance criante avec la grande maison. Le style Le Corbusier transparaît à travers cette bâtisse qui semble appliquer les mêmes principes architecturaux que la grande maison, à une échelle réduite.
    L'architecte est particulièrement connu pour ses théories autour des cinq points de l'architecture moderne : les pilotis, le toit-terrasse, le plan libre, la fenêtre-bandeau, la façade libre.
    Si la Villa Savoye possède bien toutes ces caractéristiques, la mini-villa n'en a que quatre. Vu sa surface réduite, le toit-terrasse n'a pas pu être aménagé, mais l'architecte a tout de même dessiné un toit plat à la maison.
    Pour le reste, la Maison du Jardinier est une réalisation que Le Corbusier ne pourrait pas renier.
    La façade libre et la fenêtre-bandeau font partie de l'identité visuelle de cette loge, c'est ce qui la distingue d'une autre maison individuelle au premier coup d'œil.
    De plus, la structure sur pilotis reliée par une poutre de béton est également présente et permet de se passer de murs porteurs dans la maison. L'architecte aime s'affranchir de ces derniers pour créer un espace aménageable sans contrainte structurelle, c'est donc le plan libre qui s'applique dans la loge.
    Une loge à laquelle ont été appliqués les principes architecturaux de Le Corbusier

    Un logement minimum

    Un logement minimum  - La Maison du Jardinier de Le Corbusier
    Un logement minimum - La Maison du Jardinier de Le Corbusier © Amélie Njaboum - MAP
    En suivant ses principes Le Corbusier a fait de cette petite maison de 35 m2 un lieu fonctionnel et minimaliste. Conçue pour accueillir une famille, elle répond à des exigences dictées par le mode de vie populaire du début des années 1930.
    Sur deux étages, elle est constituée d'un espace de vie dans lequel s'intègrent la cuisine et la chambre des parents, séparées du salon par une porte coulissante. Une chambre d'enfant est également accessible par cet espace central.
    Dans un souci de recherche de fonctionnalité, l'architecte a conçu des rangements intégrés dans les chambres et sous les fenêtres.
    Un logement minimum

    Un travail de réagencement des pièces après quelques restructurations

    Un travail de réagencement des pièces après quelques restructurations - La Maison du Jardinier de Le Corbusier
    Un travail de réagencement des pièces après quelques restructurations - La Maison du Jardinier de Le Corbusier © Amélie Njaboum - MAP
    En 1931, au rez-de-chaussée, une buanderie était installée dans un réduit qui accueillait également la douche.
    Entre 1964 et 1967, Jean Dubuisson a fortement remanié la loge pour l'adapter aux critères de confort de cette nouvelle époque. La salle de bains a notamment été déplacée à l'étage.
    Lors de la restauration en 2015, la douche n'a pas été réinstallée en bas mais a bien été supprimée de la partie principale, au premier étage.
    Un travail de réagencement des pièces après quelques restructurations

    Une restauration précise, menée par un comité d'experts

    Une restauration précise, menée par un comité d'experts - La Maison du Jardinier de Le Corbusier
    Une restauration précise, menée par un comité d'experts - La Maison du Jardinier de Le Corbusier © Amélie Njaboum - MAP
    La redistribution des pièces n'a pas été le seul changement radical de la Maison du Jardinier. En effet, en apposant de nouvelles couches de peinture à l'extérieur comme à l'intérieur, en posant un nouveau sol souple sur le carrelage et en changeant les menuiseries, l'âme de la loge et les principes architecturaux de Le Corbusier s'en sont vus altérés.
    Depuis, les menuiseries en métal prévues à l'origine par Le Corbusier ont remplacé celles en bois et le carrelage d'origine sous le sol souple a été rénové.
    Les changements radicaux qu'a connus la loge sont la raison pour laquelle le Centre des Monuments Nationaux (CMN) a souhaité restituer l'état d'origine de la maison. Pour suivre ce chantier, un comité d'experts a été constitué, composé de représentants de la Fondation Le Corbusier, du Centre Pompidou, de la DRAC Ile-de-France et du laboratoire de recherche sur les monuments historiques.
    Une restauration précise, menée par un comité d'experts

    Une restauration avec les techniques des années 1930

    Une restauration avec les techniques des années 1930 - La Maison du Jardinier de Le Corbusier
    Une restauration avec les techniques des années 1930 - La Maison du Jardinier de Le Corbusier © Amélie Njaboum - MAP
    Restaurer la maison dans son état initial exact a nécessité des recherches approfondies dans les archives de Le Corbusier (plans et photos) mais également des études scientifiques, notamment pour retrouver les teintes d'origine des murs.
    L'une des premières étapes a été de réaliser des sondages stratigraphiques, consistant à gratter les couches de peintures pour retrouver celle d'époque. Une fois la couleur trouvée, une technique de 1930 a été employée pour être au plus près de la réalité d'avant-guerre : l'application de peinture à l'huile de lin.
    Une restauration avec les techniques des années 1930

    Des matériaux difficiles à restaurer

    Des matériaux difficiles à restaurer  - La Maison du Jardinier de Le Corbusier
    Des matériaux difficiles à restaurer - La Maison du Jardinier de Le Corbusier © Amélie Njaboum - MAP
    La principale difficulté de cette restauration a été de gérer les pathologies du béton, un problème fréquent avec les bâtiments du 20ème siècle.
    L'humidité a favorisé au fil du temps la migration de sel des plâtres et de sulfates vers les murs. Des fissures se sont créées et le béton utilisé lors de la construction a souffert d'éttringite (une désagrégation du matériau).
    Pour améliorer les conditions de conservation du bâtiment, une isolation thermique a été posée sur la toiture-terrasse et une centrale de traitement de l'air a été installée dans la buanderie du rez-de-chaussée, transformée en local technique, afin de maîtriser l'hydrométrie intérieure de la loge.
    Des matériaux difficiles à restaurer

    Fiche technique de la Maison du Jardinier

    Fiche technique de la Maison du Jardinier - La Maison du Jardinier de Le Corbusier
    Fiche technique de la Maison du Jardinier - La Maison du Jardinier de Le Corbusier © Amélie Njaboum - MAP
    La Maison du Jardinier (1931)
    Programme : Restauration dans son état initial
    Localité : Poissy (78)
    Maître d'ouvrage : Centre des Monuments Nationaux
    Architecte d'origine : Le Corbusier
    Durée des travaux : 6 mois
    Fiche technique de la Maison du Jardinier
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