Obsolescence programmée : un site pour lister les produits durables

    Mis à jour le 28 janvier 2019
    Date de publication et auteurs
    Publié le 9 octobre 2014 par Rouba Naaman-Beauvais
    Electroménager
    Electroménager © Visuel prétexte
    L'obsolescence programmée fait parler d'elle depuis des années. Devenue un délit, niée par les fabricants d'électroménager, elle est aujourd'hui contrée... par les consommateurs eux-mêmes. Décryptage.
    Un grille-pain qui cesse de fonctionner quelques semaines après la fin de la garantie. Une pièce d'un robot ménager, petite mais stratégique, qui casse, et c'est tout l'appareil qu'il faut changer. Une panne de lave-linge irréparable parce que l'élément à changer est inaccessible.
    Ces situations, beaucoup de consommateurs les ont déjà vécues. Simple coïncidence ou acte volontairement malveillant de la part des fabricants, pour pousser les ménages à racheter régulièrement de nouveaux produits ? Le phénomène est connu sous le nom d'obsolescence programmée.

    Obsolescence programmée : définition

    Derrière ce terme mystérieux, se cache une pratique visant à réduire délibérément la durée de vie des appareils électriques et électroniques, notamment l'électroménager. L'astuce permettrait d'augmenter la fréquence d'achat d'objets comme les réfrigérateurs, les téléviseurs ou les fours, que l'on ne rachète que lorsqu'ils tombent en panne, qu'ils sont irréparables et plus sous garantie. Notez que les fabricants d'électroménager ont toujours nié l'existence d'un tel procédé.
    Et l'obsolescence programmée concernerait toute sorte de produits, de l'ampoule au collant en nylon, en passant par les téléphones mobiles... De quoi rendre fou le consommateur ! A tel point qu'un site à vu le jour : Produits Durables, animé par l'association HOP (Halte à l'obsolescence programmée) et le site communautaire Comment Réparer. L'objectif : réunir les expériences positives des consommateurs autour de produits qui ont duré dans le temps, à l'inverse des machines accusées d'obsolescence programmée. Mais aussi, créer au final un indice de réparabilité des équipements, qui aideraient, à terme, les consommateurs à bien choisir leurs appareils.

    Source de débat depuis des années

    Pointé du doigt par les associations de consommateurs depuis plus de dix ans, ce phénomène est considéré comme un mythe par les fabricants d'appareils électroménagers. Une étude cinglante, co-signée par les Amis de la Terre et le Cniid (Centre national d'information indépendante sur les déchets) en 2010, dénonçait des stratégies commerciales courantes, visant à empêcher la réparation d'un appareil lorsqu'il est en panne : pièces de rechange non suivies, éléments indémontables, service après-vente incompétent, etc.
    La réponse du Groupement interprofessionnel des fabricants d'appareils d'équipement ménager (GIFAM) ne se fait pas attendre : non, les fabricants ne sabotent pas leurs produits. Preuve en est, deux études TNS-Sofres sur la durabilité du gros électroménager, réalisées en 1977 et 2010/2011, et qui révèlent que la durée de vie des appareils n'a presque pas changé en 30 ans (11 à 15 ans selon le type d'appareil).
    Cependant, les professionnels bottent en touche régulièrement lorsqu'ils sont questionnés plus précisément sur le taux de panne des produits, et la proportion d'appareils réparés. Certains se cachent sous la pancarte du secret de fabrication pour contourner le sujet. Selon le Gifam, il conviendrait de distinguer le cas des appareils électroménagers (fours, téléviseurs, réfrigérateurs...) de celui des appareils électroniques (smartphones, ordinateurs, tablettes...) pour lesquels les consommateurs sont poussés à l'achat par des offres promotionnels des revendeurs. Difficile, donc, de démêler le vrai du faux.

    Les politiques s'en mêlent

    Le sujet, en tout cas, continue de déchaîner les passions, y compris chez les politiques, en tête desquels les écologistes qui invoquent, outre le droit du consommateur, l'aspect environnemental de la surconsommation d'appareils électriques et électroniques. Lors de sa campagne pour l'élection présidentielle en 2012, Eva Joly avait ouvertement pris pour cible l'obsolescence programmée. En avril 2013, le sénateur Jean-Vincent Placé (EELV) relance le débat en déposant un projet de loi pour créer un "délit d'obsolescence programmée".
    La loi consommation, dite loi Hamon, de février 2014, instaure enfin une obligation pour les fabricants d'indiquer la durée pendant laquelle les pièces détachées de l'appareil seront disponibles. Avec l'idée d'aiguiller le consommateur lors de l'achat, au même titre que la consommation énergétique et le niveau sonore sur l'étiquette énergie.
    Le sujet revient sur le tapis dans le cadre du projet de loi sur la transition énergétique. En septembre 2014, les députés EELV Eric Alauzet, Denis Baupin et Cécile Duflot ont déposé un amendement qui propose de punir l'obsolescence programmée comme une tromperie économique "sur la durée de vie du produit, intentionnellement raccourcie lors de sa conception". "Ces pratiques sont néfastes pour l'environnement et pèsent sur le pouvoir d'achat des ménages", ajoutent les trois auteurs.

    Une loi pour contrer l'obsolescence programmée

    C'est finalement en août 2015, avec la loi sur la transition énergétique et pour la croissance verte, qu'apparaît une définition juridique de l'obsolescence programmée : "L'obsolescence programmée se définit par l'ensemble des techniques par lesquelles un metteur sur le marché vise à réduire délibérément la durée de vie d'un produit pour en augmenter le taux de remplacement". Ce qui est devenu un délit, d'après le code de la Consommation, est puni de deux ans d'emprisonnement et de 300.000 € d'amende.
    L'objectif est avant tout de dissuader les fabricants d'opter pour de telles pratiques car, concrètement, il sera probablement complexe voire impossible de réussir à prouver le caractère intentionnel d'une panne.

    Aucun cas avéré d'obsolescence programmée

    Par le passé, aucun cas d'obsolescence programmée n'a pu être prouvé. Le cas des imprimantes Epson, qui tomberait en panne au bout de 18.000 impressions à cause d'une puce intégrée dans la machine, fait scandale en 2011. Le fabricant répond qu'il s'agit en fait d'un composant qui estime l'état du tampon encreur, et prévient l'utilisateur qu'il convient de le changer. Aucune preuve tangible ne permet, jusqu'à présent, de départager les deux histoires.
    Le groupe Apple est également souvent pointé du doigt, d'une part pour des éléments irremplaçables car soudés dans ses appareils, d'autre part pour l'arrêt stratégique des mises à jour de ses systèmes d'exploitation, obligeant les utilisateurs à changer de tablette ou de smartphone. Mais, ce cas de figure tombera-t-il sous le coup d'une éventuelle loi sur l'obsolescence programmée ? Ou s'agit-il simplement d'une évolution naturelle d'un produit électronique ?
    En attendant les éventuelles solutions juridiques, la motivation des consommateurs, elle, pourra s'exprimer au travers des collaborations et des témoignages.
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